Le 20e congrès du Parti communiste chinois (PCC) qui vient de se conclure a, sans surprise, maintenu au pouvoir Xi Jinping. L’actuel président, qui dirige la Chine depuis 10 ans, entame donc un troisième mandat, chose qu’il avait rendue possible en amendant en 2018 la Constitution mise en place par l’ancien secrétaire du PCC, Deng Xiaoping, qui limitait les mandats à deux.

La voie semble donc libre pour l’homme fort de Pékin, qui a renforcé son pouvoir en instaurant un culte de la personnalité digne du Grand Timonier et qui a su, au nom de la lutte contre la corruption, s’entourer de fidèles et éliminer ses opposants. Lors du discours d’ouverture du Congrès, il a critiqué le travail de ses prédécesseurs pour ensuite dresser un portrait très positif de son règne, réaffirmant ses intentions de faire de la Chine un « grand pays moderne dans tous les domaines » en 2035 et voué à atteindre le « premier rang mondial » en 2049. Pour y parvenir, Xi Jinping a insisté sur le fait que cela se ferait non à l’occidentale, mais à l’inverse de ces pays qui se sont modernisés « à travers la guerre, la colonisation et le pillage ».

Des progrès indéniables

Xi Jinping peut se targuer du développement de la puissance chinoise sur différents plans. Économiquement d’abord, en se posant en rivale majeure des États-Unis, en accroissant son emprise sur les chaînes de production à l’échelle mondiale, et en devenant créancier de nombreux pays ayant bénéficié d’investissements considérables. Militairement ensuite, l’armée et la marine chinoises – dont Xi Jinping avait fait un des premiers objectifs de sa lutte anticorruption – étant devenues des puissances à l’échelle mondiale. Diplomatiquement ensuite, puisque la Chine a continué à étendre son emprise dans plusieurs organisations mondiales, notamment à l’Organisation des Nations unies (ONU), où elle a réussi à bloquer un vote du Conseil des droits de l’homme sur la situation des Ouïghours au Xinjiang.

Le pays a aussi étendu son influence en concurrençant les États-Unis dans des régions où ils pensaient être solidement implantés : dans le Pacifique, aux îles Salomon, ou en Amérique latine où Pékin a largement diffusé des vaccins contre la COVID-19.

Technologiquement enfin, en devenant une puissance spatiale majeure, et en se positionnant comme un leader dans le domaine de technologies de pointe comme la 5G, ou les énergies vertes, solaires et éoliennes en tête.

Cap sur 2049

Plusieurs de ces réalisations relèvent de mesures lancées par les prédécesseurs de Xi Jinping, mais ce dernier n’a aucun scrupule à s’en attribuer le mérite. Parmi ses nombreuses « pensées » dont sont émaillés les médias d’État chinois, il y a « persévérer, c’est vaincre ». Vaincre l’adversité, le défaitisme, les pressions américaines visant à concurrencer l’influence et les produits chinois. S’il est difficile de prévoir ses intentions personnelles à long terme, il est par contre évident que ses ambitieux projets pour la Chine s’inscrivent dans l’optique d’une échéance majeure : celle de 2049, année du centenaire de la République populaire.

Néanmoins, malgré tous ses efforts et sa poigne de fer, le leader chinois va être confronté à d’importants défis : le ralentissement de son économie, la forte croissance du chômage des jeunes, les tensions et l’instabilité à Hong Kong et au Xinjiang, le cas épineux de Taïwan, et les inquiétants signes d’essoufflement du projet phare des Nouvelles routes de la soie, lancé en 2013. Quant à la stratégie zéro COVID-19, qui continue à exiger de la population chinoise d’importants sacrifices, elle suscite un mécontentement sourd, mais indéniable, dont les manifestations pourraient devenir visibles.

Pour faire face à ces défis, au cours de ce troisième mandat et qui sait, au cours des suivants, Xi Jinping va appliquer sa maxime et « persévérer ». Il va accroître sa mainmise sur la population chinoise par une surveillance accrue, maintenir le cap dans sa politique zéro COVID-19 et essayer de relancer l’économie.

Sur la scène internationale, il va continuer à présenter la Chine comme une alternative à l’influence occidentale, quitte à maintenir un front uni avec la Russie, une relation qui ressemble plus à un mariage de raison que d’amour. Il va également devoir fixer une échéance et un type d’action quant à la réunification avec Taïwan. Ces défis de taille, parmi tant d’autres, vont accaparer cet homme, qui concentre de plus en plus le pouvoir entre ses mains et qui semble prisonnier de sa propre logique.

Un proverbe chinois dit que « celui qui chevauche un tigre a peur de descendre ». Xi Jinping monte un animal qu’il a lui-même nourri depuis 10 ans, mais dont il n’a plus le loisir (ni l’intention) de débarquer sous peine de se faire dévorer. Son destin est intimement lié à celui de la Chine… et à celui du reste du monde.

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