Avec un plan, un office de prévention de la violence et un investissement intelligent dans la prévention en amont, Montréal pourrait réduire la violence de 50 % dans les prochaines années.

Les récents homicides tragiques d’adolescents montréalais continuent de secouer la métropole. Jayson Colin est l’une des nombreuses victimes tombées sous les balles dans les derniers mois à Montréal. Sa mère et son beau-père, tous les deux intervenants auprès des jeunes à Montréal-Nord depuis plusieurs années, suggèrent que pour prévenir la violence, la Ville de Montréal devrait élaborer un plan de sécurité urbaine qui réunit les acteurs clés et qui dirige les investissements vers des mesures éprouvées. Ils ont raison.

Le rapport annuel du SPVM pour 2021 rapporte 25 129 crimes violents à Montréal, soit 17,3 % de plus que la moyenne des cinq dernières années. Le SPVM a également dénombré 36 homicides en 2021, contre 25 en 2020. Les évènements impliquant des armes à feu ont également doublé de 2020 à 2021.

Les solutions proposées pour combattre la violence au Canada se résument souvent à l’augmentation du nombre de policiers et de la sévérité des peines d’emprisonnement. Pourtant, une simple comparaison entre deux villes de même taille montre qu’un plus grand nombre de policiers et de personnes en prison ne suffit pas. Chicago compte deux fois plus de policiers que Toronto et est situé en Illinois, un État qui compte cinq fois plus de personnes incarcérées qu’en Ontario, mais dix fois plus d’homicides.

Si les mesures punitives étaient efficaces, les villes américaines seraient les plus sûres au monde. C’est pourtant loin d’être le cas.

Au cours des 50 dernières années, des recherches, des essais contrôlés aléatoires et des commissions nationales ont déterminé ce qui fonctionne pour arrêter les crimes violents avant qu’ils ne se produisent. La prévention, qui implique de s’attaquer aux facteurs de risque de la violence, permet d’obtenir une réduction de 50 % des taux de criminalité violente en quelques années, et ce, de manière le plus rentable.

L’exemple de Glasgow

Il existe plusieurs approches préventives ayant donné d’excellents résultats. Elles peuvent prendre la forme d’initiatives de sensibilisation auprès des jeunes hommes, d’accompagnement des victimes dans les salles d’urgence des hôpitaux, de mentorat et de soutien aux familles, d’initiatives qui augmentent les compétences professionnelles et l’accès à l’emploi chez les jeunes, ainsi que de programmes scolaires qui abordent les attitudes et les croyances face à la violence. La prévention en amont peut également inclure des actions basées sur l’analyse épidémiologique des victimes de violence qui reçoivent des soins médicaux d’urgence. La mobilisation de stratégies semblables a permis à la ville de Glasgow en Écosse de réduire la violence de plus de 50 % et ainsi de devenir un exemple de bonne pratique à imiter.

Pour réduire la violence de manière significative en peu de temps, Montréal doit mettre en place des approches novatrices pour élaborer un plan intégré.

Tandis que les efforts actuels de prévention de la violence sont largement dirigés par les services de police, la Ville de Montréal pourrait plutôt se concentrer sur la création d’une expertise et d’une vision municipales qui abordent la violence dans son ensemble et qui préconisent la prévention.

Pour ce faire, les éléments essentiels incluent une unité permanente pour la prévention de la violence qui a une forte connaissance des solutions éprouvées, un diagnostic des problématiques locales en matière de sécurité et une participation active du public.

Afin d’assurer le succès d’une telle approche, un investissement de 50 millions de dollars par an, soit l’équivalent d’à peine 7 % du budget du SPVM, serait nécessaire afin de soutenir la mise en œuvre de programmes de prévention efficaces, de mener la collecte de données pour mesurer les résultats, ainsi que d’offrir des formations aux professionnels impliqués dans les efforts de prévention. L’investissement dans une telle approche permettrait non seulement d’économiser des sommes importantes engendrées par les torts aux victimes ainsi que les coûts des mesures réactives, il permettrait également de sauver des vies, d’éviter des traumatismes importants et de prévenir des bavures policières. Surtout, il permettrait d’éviter que d’autres parents soient forcés d’enterrer leurs enfants à l’issue d’une fusillade. C’est très peu cher payé.

1. Consultez le site du Réseau municipal canadien en prévention de la criminalité 2. Consultez la page d’Irvin Waller Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion