Le monde de l’éducation avait beaucoup d’attente envers les politicien.ne.s pendant la récente campagne électorale. À l’exception de quelques promesses lancées pour attirer des votes, l’enjeu de l’éducation aura été un des grands absents du discours politique.

Outre la promesse de bâtir une école « si nous sommes élu.e.s » ou encore celle de, « payer les frais de la rentrée scolaire… si nous sommes élu.e.s », il fallait fouiller dans les différents programmes des cinq prétendants pour trouver le reflet d’une orientation structurante en éducation. Promettre des postes et des ressources avait quelque chose de surréaliste aux yeux d’un Québec hurlant sa pénurie de main-d’œuvre. Force est de constater l’écart entre les urgents besoins du milieu scolaire et les promesses faites pendant la campagne électorale. Pourtant, on a beau retourner la question dans tous les sens, on en revient toujours à la même conclusion : l’école québécoise a besoin de bienveillance, de vision et de courage politique.

Prendre soin des personnes

L’éducation au Québec s’articule autour des personnes adultes, présentes tous les matins dans les quelque 2700 établissements scolaires. Ces humains ont besoin d’air, de stabilité, de défis à la hauteur de leurs compétences. Comment accueillir et intégrer les nouvelles personnes dans leur poste ? Comment enrayer le découragement professionnel précoce et maintes fois décrié ? Comment reconnaître l’inexpérience des nouvelles personnes et leur proposer des tâches à la mesure de leur stade de développement professionnel ? Comment leur procurer les marges de manœuvre suffisantes pour faciliter l’innovation, peu importe le poste occupé ?

L’école québécoise est essentiellement humaine. Se préoccuper des conditions de travail et du climat dans lequel elles et ils œuvrent placera immédiatement la nouvelle ou le nouveau ministre au diapason de son réseau.

Après tout, la grande priorité de ces personnes n’est-elle pas d’aller chercher le meilleur en chacun des élèves et de faire de l’expérience scolaire de nos jeunes un moment charnière de leur existence ? Faire preuve de bienveillance envers le personnel scolaire se reflétera assurément sur la qualité de l’expérience scolaire de nos jeunes et moins jeunes élèves.

Définir la nouvelle mission de l’école québécoise

L’heure est venue de revoir le programme de formation de l’école québécoise. L’actuel programme approche les 25 ans d’âge. Il fut rapiécé au fil des années sous l’influence des idées du jour, des volontés politiques, des évènements ponctuels et de la pression de groupes d’intérêts. Il a maintenant des allures de courtepointe. On a aussi peine à démêler les responsabilités de l’école et celles des parents.

Mais le monde change. Vite. Comment peut-on croire en l’actualité d’un programme de formation né en même temps que l’internet ? Comment apprend-on et que doit-on apprendre en 2025 pour demeurer en phase avec un monde en perpétuel changement ? N’est-il pas temps de se remobiliser autour d’une mission scolaire commune, mutuellement négociée et adoptée ?

Recentrer la mission de l’école québécoise autour des enjeux de notre temps, proche des communautés dans lesquelles cette école vit, aura toutes les chances de donner un sens à la scolarisation des Québécoises et des Québécois. Instruire, socialiser et qualifier aura eu le dos large au cours des deux dernières décennies. Il est grand temps d’ouvrir le dialogue et de permettre l’émergence d’une vision collective de la mission de l’école québécoise.

Mettre fin à la ségrégation scolaire

Nous l’avons lu à maintes reprises, l’école québécoise est inégalitaire et les inégalités qui la traversent s’accentuent sous l’effet de la concurrence entre les secteurs privé et public. En d’autres mots, le système scolaire favorise certains élèves au détriment d’autres élèves. Il n’est maintenant plus permis de fermer les yeux sur le clivage social et l’inégalité des chances institutionnalisées. Corriger cette discrimination sociale nécessitera un courage politique placé au service du bien commun et d’un vivre ensemble inclusif.

L’immobilisme à ce niveau maintiendrait le fossé séparant nos manières de faire l’école et les conclusions de la recherche, pourtant claires à ce sujet : l’hétérogénéité dans une classe ne ralentit en rien les élèves ayant de la facilité et tend à hausser le niveau d’apprentissage des élèves éprouvant des difficultés. Si l’école permet d’acquérir de nouvelles connaissances et de développer des compétences, elle a également une mission de socialisation, de compréhension du monde dans lequel nous vivons et d’inclusion respectueuse de toutes et tous.

En fait, l’école québécoise doit refléter nos valeurs sociales et permettre à nos jeunes et moins jeunes de les épouser et de les développer. Nous ne parviendrons jamais à vaincre la discrimination sociale et la ségrégation scolaire en maintenant une école québécoise à trois vitesses. C’est une immense responsabilité de faire de l’école québécoise le projet d’avenir d’une société égalitaire et inclusive.

Peu importe la personne à être nommée au poste de ministre de l’Éducation, l’école publique québécoise attend avec grand appétit un leadership politique bienveillant, visionnaire et courageux.

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