La mort de la reine Élisabeth II ouvre la porte à une réflexion collective sur les rôles et fonctions de la Couronne à l’intérieur des institutions politiques canadiennes et québécoises. Le Canada et le Québec, faut-il le rappeler, ont à leur tête un chef d’État qui n’est plus en phase avec l’esprit du temps et qui symbolise, même naturalisé, l’époque coloniale avec tout ce que cela implique : génocide envers les Autochtones et les Métis, déportation des Acadiens et oppression systémique des Canadiens français partout au Canada, particulièrement au Québec.

Malgré son anachronisme, la Couronne canadienne se maintient sans trop de difficulté en raison des liens historiques entre le Canada et le Royaume-Uni, de la relative indifférence de la population face à cet enjeu et surtout du manque de volonté des gouvernements d’ouvrir la « chambre forte » constitutionnelle.

En effet, changer de régime implique forcément de revoir l’architecture du système politique canadien, ce qui annonce la réouverture d’autres chantiers beaucoup plus sensibles : la réforme du Sénat, la révision de la péréquation, la reconnaissance des Autochtones au Canada et la place du Québec à l’intérieur de l’espace fédéral.

Alors qu’à Québec le chef du Parti québécois Paul St-Pierre Plamondon mène actuellement une bataille pour éviter de prêter serment à la Couronne, le Bloc québécois semble timide à faire de cet enjeu une priorité.

Pourtant, le Bloc pourrait saisir là une chance de se démarquer puisque tous les autres partis politiques sur la scène fédérale ont annoncé qu’ils ne voulaient pas revoir la monarchie constitutionnelle.

Justin Trudeau a même été jusqu’à pousser l’audace en affirmant sans frémir qu’Élisabeth II était « une de mes personnes préférées au monde ».

Pourquoi le Bloc québécois ne prend-il pas le leadership sur cette question en combattant vigoureusement le monarchisme et en militant pour la République du Canada et du Québec ? En attendant un bien hypothétique référendum, il s’agit là d’une raison d’être qui s’inscrit parfaitement en lien avec la défense des intérêts du Québec sur la scène fédérale, car rappelons-le, les Québécois sont largement favorables à l’abolition de la monarchie.

Les années Duceppe

À l’origine, le Bloc québécois devait être un parti temporaire dont l’objectif premier était d’assurer la défense des intérêts du Québec à la suite d’un référendum gagnant. Après la défaite référendaire de 1995 et avec l’arrivée de Gilles Duceppe, le Bloc s’est réinventé en défendant des objectifs plus larges comme la défense des valeurs québécoises, la protection du poids politique du Québec à l’intérieur du Canada ou encore les transferts en santé.

Si cet élargissement a permis au Bloc de régner sur le Québec et de jouer un rôle important à Ottawa jusqu’à la vague orange de 2011, il risquait, a contrario, d’en faire un parti fédéraliste comme les autres. Autrement dit, les députés du Bloc, malgré leur excellent travail, sont devenus, sans le vouloir, de simples fonctionnaires à la solde de la Couronne canadienne.

Pour éviter ce retour en arrière, le Bloc doit retrouver l’initiative, car avec l’usure du pouvoir, il ne pourra plus compter sur le nationalisme de la Coalition avenir Québec pour faire croître ses appuis. Le combat contre la monarchie représente une opportunité intéressante et stimulante. Saura-t-il la saisir ?

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