J’ai 34 ans. Je vote depuis que j’ai 18 ans. On a beaucoup parlé du manque d’intérêt des jeunes envers la politique. Et franchement, je les comprends. Je n’ai pas connu la politique des années 1970 où l’on construisait avec enthousiasme le Québec de demain. La seule politique que j’ai connue depuis 16 ans, c’est celle de politiciens entourés de scandales qui font la sourde oreille aux jeunes. C’était le cas pour l’éducation en 2012, où la seule option était de manifester pendant des mois dans la rue pour se faire entendre. C’est encore le cas aujourd’hui avec l’environnement, où l’on doit sans cesse marteler nos craintes. Qui écoute ?

Qui prend acte de nos besoins, de nos craintes et de notre anxiété face à l’avenir ? C’est nous qui devrons vivre avec les conséquences des décisions qui seront prises aujourd’hui et demain. J’ai entendu peu de politiciens parler de nos enjeux durant la campagne électorale. C’est comme si nous n’existions pas. Ne soyez pas surpris que les jeunes n’aillent pas voter.

Depuis seulement 20 ans, j’ai vu l’environnement se dégrader à la vitesse grand V. J’ai vu la société changer, s’ouvrir à plusieurs enjeux sociaux et se remettre en question. Plusieurs choses ont bougé rapidement. Mais le visage de la politique n’a pas changé. Nous sommes encore avec les mêmes politiciens et le même système politique. On doit évoluer sur ça aussi.

Chaque élection, je vote avec mon cœur. Même si l’envie de voter stratégiquement a souvent été forte, je me suis toujours convaincue que la démocratie, ça ne devrait pas être ça. J’ai donc très rarement gagné mes élections. Parce que les gens qui pensent comme moi ne sont pas nécessairement mes voisins. Ils sont répartis dans la province. Mais, dans notre système démocratique, ça ne veut rien dire.

Ça ne veut rien dire que 59 % des électeurs n’aient pas choisi la CAQ, ce parti aura de toute façon la grosse majorité du pouvoir. Ça ne veut rien dire que 13 % des électeurs aient choisi le Parti conservateur, ils n’auront pas de représentant à l’Assemblée nationale. Ça ne veut rien dire qu’un parti ait obtenu 13, 14 ou 15 % des voies, le nombre de députés ne sera pas en conséquence.

Chaque élection, je me couche avec un immense sentiment d’injustice. On a très rarement la représentativité politique qu’on devrait. Et, chaque fois, la réforme du mode de scrutin disparaît des promesses électorales. Évidemment qu’un parti ne réformera pas un système qui l’a mis au pouvoir.

J’ai tilté quand j’ai entendu François Legault dire que ce n’était pas une priorité pour les Québécois. Vraiment ? Je suis assez certaine que 59 % des électeurs ne sont pas d’accord avec lui ce matin.

On a beaucoup parlé de la survie de la langue française (et avec raison), mais personne n’a parlé de la survie de notre démocratie. On se demande pourquoi il y a de plus en plus de gens qui se radicalisent et de moins en moins de gens qui votent. Donnez du pouvoir à la population et elle n’aura pas l’impression qu’elle doit prendre des moyens extrémistes pour se faire entendre. Faites que chaque vote compte. Arrêtez de gouverner comme si vous aviez l’appui de la majorité, alors que ce n’est pas le cas. Tout le monde devrait être représenté correctement à l’Assemblée nationale, sinon à quoi bon ?

Monsieur Legault, si la démocratie veut encore dire quelque chose pour vous, réformez le mode de scrutin. On ne devrait pas avoir à sortir sans cesse dans la rue pour se faire entendre. Écoutez-nous et peut-être que ma génération et les suivantes auront envie de participer au débat.

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