Le plus récent rapport du comité d’experts chargé de conseiller le gouvernement en matière de changements climatiques comprend d’excellentes recommandations qui visent, entre autres choses, à réduire le réchauffement climatique. Ces recommandations sont excellentes, mais n’aideront en rien la situation climatique.

Le Québec émet l’équivalent de 85 mégatonnes de CO2 dans l’atmosphère annuellement. À la grandeur de la planète, on en émet un peu moins de 50 000 mégatonnes, dont la moitié provient de la Chine, des États-Unis, de l’Inde et de la Russie. Le Québec pourrait réduire à zéro ses émissions de gaz à effet de serre (GES) qu’on ne le remarquerait pas. Le Québec fait ainsi deux erreurs dans la gestion de la crise climatique mondiale, et ce, indépendamment du fait que ses politiques environnementales sont trop molles : 1) on demande aux pauvres de payer pour les riches, et 2) le débat sur les émissions de GES est trop politique.

Le Québec est pauvre ; si le Québec était un État américain, seul le PIB par habitant du Mississippi serait plus faible. Or, on voudrait mettre en place des politiques qui réduisent notre richesse pour augmenter celle de nos voisins du Sud, largement plus exposés aux risques climatiques ; c’est ridicule. Dans quelle sorte de social-démocratie dystopique voudrions-nous que les pauvres payent pour les riches ? Ce n’est pas en réduisant notre richesse relative que nous viendrons à convaincre la Chine, les États-Unis, l’Inde et la Russie du bien-fondé d’une bonne gestion climatique.

Le débat est trop politique et politisé, surtout alors que c’est inutile. Donnons un plus grand levier aux changements structurels que les États-Unis, entre autres, sauront un jour apporter à leurs politiques climatiques en adoptant systématiquement toutes les politiques que le Congrès américain appliquera en ce sens. Ça ne sert à rien de jouer seul.

Une politique climatique propre au Québec est l’équivalent de mettre un péage sur le pont Jacques-Cartier, entre 1 h et 4 h du matin, pour réduire la congestion routière : ça n’aura aucun impact.

Les politiques environnementales sont trop molles partout sur la planète. Même si l’on sait depuis longtemps qu’on devrait mettre un prix sur les émissions de GES, aucun politicien n’est prêt à perdre une élection pour le faire, surtout pas si l’impact global serait essentiellement nul. Pourtant, il serait tellement facile de créer un système global de droits d’émissions de GES… à condition que ce coût soit le même pour tout le monde sur la planète, sans exception, comme pour le pétrole et l’or. Une tonne de carbone n’est-elle pas une tonne de carbone, quelle que soit sa source ?

Il faut ainsi que le Québec se positionne agressivement pour profiter des changements radicaux qui se produiront aux États-Unis, en Chine, en Inde, en Russie et en Europe d’ici 25 ans. Pourquoi ne pas profiter de la capacité du Québec à générer de l’hydroélectricité pour alimenter les États voisins ? Avons-nous vraiment au Québec un avantage concurrentiel à produire de l’électricité par les éoliennes ? L’hydroélectricité n’est-elle pas une source potentielle incroyable de richesse pour les Premières Nations qui, depuis longtemps, demandent une juste compensation pour l’utilisation de leurs territoires ancestraux ? Peut-on réellement imaginer un projet de société qui serait meilleur que celui qui augmente la richesse collective, répare des torts historiques, limite la croissance dans l’utilisation de combustibles fossiles et réduit les émissions de GES dans l’ensemble de l’Amérique ?

La question qu’on doit se poser collectivement n’est pas si la réduction des émissions de GES est une nécessité planétaire, ce l’est. La question est plutôt : tant que les Chinois, les Américains, les Indiens et les Russes refuseront d’établir un système qui mènera à une réduction des émissions de GES à l’échelle planétaire, pourquoi le Québec devrait-il sacrifier sa richesse collective alors que l’impact environnemental planétaire net sera nul ?

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