Comme beaucoup, j’estime que la décision du gouvernement fédéral d’autoriser le projet Bay du Nord est décevante et incohérente. Mais elle n’est pas surprenante comme telle, même de la part d’un gouvernement que l’on peut qualifier de centre gauche, car la population canadienne ne semble toujours pas prête à appuyer une vision énergétique et économique qui exigerait d’elle plus que de faire des sacrifices momentanés, c’est-à-dire de changer en profondeur ses choix de vie, tant collectivement qu’individuellement.

Je suis déçu pour la population canadienne. Déçu pour les jeunes générations qui espèrent encore un avenir, juste un avenir. Déçu pour les écologistes qui saisissent depuis longtemps les enjeux, mais qui n’ont pas encore réussi à être assez convaincants pour véritablement ébranler le néo-conservatisme de nos gouvernements. Enfin, déçu aussi pour le citoyen Steven Guilbeault.

Il me semble important de rappeler qu’il s’agit là d’une décision gouvernementale. Par conséquent, elle a assurément fait l’objet de vives discussions au Conseil des ministres. Nul doute que le ministre de l’Environnement en a profité pour expliquer, nuancer et convaincre... avec le résultat qu’on connaît.

Sa décision de se lancer en politique comportait d’énormes défis, notamment celui d’essayer d’influencer, de convaincre, de transformer la machine politique afin de l’aiguiller vers un véritable intérêt commun. Il a dû apprendre à parler au nous et non plus au je, avec toutes les limitations que cela comporte, c’est le chemin sinueux à prendre pour qu’un jour s’ouvrent les pistes d’avenir. Force de constater qu’il ne doit pas être un prophète en son pays, mais un guerrier...

Maintenant que la décision est prise, il nous faut lutter contre notre déception et ne pas tomber dans la simplification à outrance. Ce n’est pas la défaite d’un homme, mais celle d’une société, la nôtre. Nous devons continuer à expliquer, à bien comprendre les hésitations de nos voisins, à fédérer encore et toujours plus la population et à la convaincre qu’il est encore possible de changer les choses et, enfin, nous souvenir qu’en environnement, la victoire ne peut être que collective !

* L’auteur a été membre de groupes environnementaux pendant de nombreuses années, régisseur à la Régie de l’énergie de 2007 à 2021, membre du Barreau du Québec.

Qu’en pensez-vous ? Exprimez votre opinion Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion