Nous le savons, le discours racialiste gagne en popularité de jour en jour au Québec, affichant un désir de réduire les inégalités raciales qui persisteraient dans la société contemporaine.

Ces adhérents préfèrent s’appeler des « antiracistes », mais en étudiant leurs discours, on peut se rendre compte assez rapidement que leurs idées font terriblement régresser nos conceptions de la vie en société. On nous explique ainsi que l’universalisme, hérité du christianisme puis des Lumières, serait une supercherie prônée par « les dominants » pour perpétuer la suprématie blanche sur les communautés marginalisées. Certes. Faut-il vraiment rappeler que cette idée révolutionnaire a permis de guider les hommes de partout dans le monde vers la liberté ? Grâce à elle, l’esclavage et le colonialisme impérial ne sont plus que choses du passé, quoi qu’en disent des universitaires marxistes pédants.

Disons que nos racialistes sont friands de raccourcis intellectuels du même type, y allant de toutes sortes d’interprétations de la société pour le moins hasardeuses. Prenons un exemple.

À l’Université du Québec à Montréal (UQAM), là où j’étudie, j’ai ainsi pu entendre récemment un propos pour le moins étonnant. Au détour d’une présentation orale, le professeur, que je respecte et qui possède des qualités indéniables, affirme que la musique classique était « blanche et occidentale ». Aussitôt cela entendu, je demande en quoi la musique classique serait « blanche ». Une collègue de me répondre que cela relève de l’évidence, pendant qu’une autre roule les yeux. Mais encore ? La musique classique ne trouve-t-elle pas écho sur tous les continents du monde ? Bien sûr, me dit-on : elle n’en demeure pas moins « européocentrée » et ses grands noms sont « blancs ». Mais les autres peuples du monde n’ont-ils pas leurs compositeurs, leurs interprètes, leurs auditeurs ? De quelle façon la « blancheur » des grands compositeurs occidentaux vient s’imprégner dans leurs partitions ? On me répond par râlements d’exaspération en m’accusant de faire preuve de « mauvaise foi », à la manière d’un écolier agaçant qui ne veut rien comprendre.

Pour peu qu’on connaisse l’histoire du communisme, on peut faire ici une analogie légitime avec la Chine maoïste, où les gardes rouges bannissaient la musique classique au nom de son « appartenance bourgeoise ». La Révolution culturelle ne devait plus laisser aucune trace des perversions de l’Occident capitaliste. Des musiciens dissidents avaient le courage de jouer Chopin, Bach et Rachmaninov en cachette et de transmettre le génie de ces compositeurs à des talents potentiels.

Aujourd’hui, c’est en pleine terre occidentale que nous reprenons ce discours en remplaçant simplement le mot « bourgeois » par « blanc ». Est marqué du sceau de l’infamie tout ce qui serait « blanc », car susceptible de promouvoir la suprématie blanche et le fantomatique « racisme systémique ».

Certes, la coercition qui s’abat sur les citoyens n’est pas du tout la même qu’aux temps de Mao, mais le raisonnement est rigoureusement le même.

Nous ferions erreur de croire que cet évènement ne doit se ranger qu’au bazar des anecdotes. Il n’est au contraire que l’un des symptômes de la maladie qui gangrène l’université depuis bon nombre d’années, à savoir le dogmatisme woke. Tout droit sorti des campus américains et de leur obsession sur la couleur de peau, ce dogmatisme universitaire s’abat sur nos établissements en s’instituant comme seule idéologie légitime et recevable. Tout récalcitrant qui oserait rappeler la légitimité des idéaux de la modernité, comme l’universalisme, se voit rangé dans la case des naïfs qui perpétuent la suprématie blanche. Il est regardé de travers, insulté, vilipendé comme un paria : doit-on alors s’étonner du climat de peur qui s’abat sur les derniers libres-penseurs de l’université ? Ils savent qu’en cas de parole « déviante », ils subiront l’ostracisme de leurs pairs et le mépris de bon nombre de professeurs.

Pourtant, il fait bon de rappeler que certaines choses sont bel et bien universelles, transcendant la couleur de peau, le sexe, l’orientation sexuelle et toute autre caractéristique.

Tout homme sur Terre est capable d’être touché par Un violon sur le sable de Rachmaninov, par la Liebestraum de Liszt ou par les Nocturnes de Chopin. Il n’y a nul besoin d’être blanc ni européen pour éveiller sa sensibilité à ces œuvres de génie. Peu importe le continent, l’ethnie ou la religion, tout homme peut aspirer à des idéaux universels et apprécier des œuvres de génie qui transcendent le temps et l’espace. Oublier cet apport essentiel de la modernité nous ferait tomber malheureusement dans une période bien sombre de l’humanité, où les différences biologiques cloisonneraient les hommes dans des groupes fort restreints.

Est-il trop tard pour faire marche arrière à la nouvelle révolution culturelle ? Non, car l’universalisme correspond à une aspiration naturelle à l’homme, dans sa part la plus noble.

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