Sur fond de pandémie, les autorités publiques ont avec raison fermé en 2020 le centre-ville. Avec les résultats que l’on connaît.

Le centre-ville que nous aimons, il est multifonctionnel, habité, sécuritaire et inclusif. Il comporte commerces et restaurants en grand nombre, trois pôles universitaires, de grands équipements culturels, récréatifs et touristiques, deux grands centres hospitaliers universitaires, un patrimoine bâti remarquable, de nombreux espaces verts, un immense parc fluvial, sans oublier le mont Royal. Il constitue la porte du tourisme et de l’immigration au Québec.

Montréal est une ville riche de ses quartiers, mais c’est son centre-ville et son statut de métropole qui lui permettent de pourvoir pleinement et financièrement aux besoins économiques, sociaux et culturels de ses habitants.

Son impact environnemental est hautement positif. Qu’il suffise de rappeler qu’en temps normal, plus de 70 % des gens qui s’y rendent le font en transport en commun, à pied ou à vélo.

Une mobilisation s’organise en faveur de la relance de la métropole et du centre-ville. Tout à tour, au cours de l’automne, la Chambre de commerce (avec Relançons Montréal), l’Institut de développement urbain (IDU), Destination Centre-Ville et Vivre en ville ont multiplié les propositions très bien documentées en ce sens. Les gouvernements et la Ville ont mis en place de nombreuses mesures d’appui aux entreprises et diverses initiatives ont été déployées pour tenter de rendre le centre-ville plus accueillant. L’expérience du centre-ville peut certainement être bonifiée et beaucoup mieux adaptée aux enjeux environnementaux, plusieurs l’ont souligné, mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

J’ai pris connaissance des réflexions qui se mènent ici et de ce qui se fait ailleurs dans le monde. Sans prétendre me substituer aux experts en santé publique, j’aimerais en tout respect pousser la réflexion un peu plus loin.

Le temps est venu, à mon avis, d’envisager une réouverture progressive des bureaux du centre-ville. Pourquoi les bureaux ? Ce que la pandémie a surtout mis en évidence, c’est l’interdépendance des secteurs d’activités. La fermeture des bureaux a eu un impact dévastateur sur une bonne partie de cet écosystème, qui dépend pour une bonne part des employés de bureau. Par ailleurs, on comprend mieux un an plus tard le télétravail, ses avantages, mais aussi ses limites.

Le premier geste à poser est simple : il faut envoyer un message clair ! L’automne 2021, c’est demain !

Alors que pour un temps, la capacité maximale des bureaux avait été rehaussée à 25 %, le télétravail est actuellement obligatoire pour les employés de bureaux, sauf exception. Les personnes que j’ai consultées sont d’avis qu’il est souhaitable de viser une occupation de 50 % à 65 % des bureaux et, surtout, de s’y préparer dès maintenant.

Si le centre-ville de Montréal compte environ 60 gratte-ciel, il ne faudrait pas oublier que New York en compte plus de 1300, Hong Kong, 700 et Chicago, 500. Partout sur la planète, des experts s’affairent depuis des mois à développer des solutions adéquates. La littérature est déjà très abondante. On pourrait certainement s’inspirer de ces travaux et des pratiques qui en découlent :

– Modifications aux systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation ;

– Révision et étalement des horaires de travail ;

– Guidage des ascenseurs sans contact ;

– Augmentation du nombre de mètres carrés alloués par personne ;

– Révision des protocoles de nettoyage ;

– Reconfiguration des espaces de travail communs ;

– Port du masque et règles de distanciation, et ainsi de suite.

La Santé publique, on n’en doute pas une seconde, jongle avec bien d’autres enjeux. Et il y a la vaccination à organiser. Et le problème des variants qui peut encore tout changer. Pour être en mesure de consacrer du temps dès maintenant à la relance éventuelle du centre-ville, elle doit donc pouvoir compter sur l’apport d’autres acteurs.

On pourrait constituer rapidement un groupe de travail en appui à la Santé publique, qui mobiliserait les acteurs qui connaissent les bureaux et le centre-ville – tels l’IDU, BOMA Québec, de grands investisseurs comme la Caisse de dépôt, quelques grands employeurs, des détaillants et des spécialistes en architecture et en design ainsi que la Société de transport de Montréal (STM).

Préparer ne veut pas dire précipiter ! Le centre-ville est un écosystème extrêmement complexe.

La mise à contribution des parties prenantes permettrait d’identifier les solutions les plus appropriées, et de convenir des stratégies à déployer et des contraintes à respecter. Personne ne voudra tourner les coins ronds. Vaut mieux commencer dès maintenant les travaux.

Cindy Fagen, de SAP Labs Canada, suggérait récemment que Montréal pourrait se positionner parmi les premiers lieux de travail post-COVID-19 dans le monde. Pourquoi pas ?

* André Lavallée a été responsable du premier plan d’urbanisme de Montréal et du premier plan de transport de l’agglomération.

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