Manifeste du Marathon des mots contre la violence conjugale

Mesdames. Mes sœurs. Belles fleurs d’automne. Je fais aujourd’hui appel à vos voix. À vos timbres et vos notes qui, à chaque coup dur, chaque revers, résonnent. Apaisent. Éclairent.

Je m’adresse aujourd’hui à vous, lumineuses. À vous dont la lumière a jadis crépité. Aux discrètes qui combattent la pénombre. À celles qui, qu’importe l’heure ou l’état, éclairent des terrains de football à grands coups de mots. À grands coups d’indignation. De courage, de dissidence pis de poings levés.

Je m’adresse à toutes celles qui ont envie de fomenter l’espoir.

Nous traversons une époque sans précédent à bien des égards, certes, mais une époque catastrophe où la violence semble être l’unique forme de réponse des preneux de pouvoir. Des siphonneurs de vie ; de ceux qui perdent l’emprise sur celle qu’ils avaient pourtant mise à leur main.

C’est le grand bal des lâches et des très petits hommes, pis y’est grand temps de fermer la billetterie.

En 2021, la violence conjugale continue de décimer les femmes. De décimer nos souffles, nos rêves, et d’étouffer demain. Et il n’est pas ici que question des 19 vies qui, au moment d’écrire ces lignes, nous ont échappé. Qu’on a échappées. Dix-neuf. Un nombre d’épouvante qui courtise la prochaine dizaine. Ça m’étourdit de devoir l’écrire, mais la santé d’une société ne se mesure pas qu’au nombre effarant des corps qui nous glissent entre les doigts. Ils n’en sont que triste vitrine. Le magasin est plein.

La violence conjugale a plusieurs visages. Elle se fait verbale. Psychologique. Économique. Sexuelle. Souvent silencieuse, toujours insidieuse, fardée juste ce qu’il faut pour nous faire croire que tout ne va pas si mal et surtout, que c’est pas de nos maudites affaires. Incessante. Au moment où vous lisez ces lignes, des milliers de femmes en sont victimes, en silence. À cette seconde précise. Parfois, sans même être en mesure de l’identifier, parce que trop peu spectaculaire pour faire rissoler le bulletin du soir. Des femmes que vous côtoyez peut-être au quotidien. Des femmes que vous aimez. De tous les milieux. De tous les âges. De toutes les origines.

Derrière les portes closes, la violence conjugale est endémique. Mais elle nous concerne toutes.

Et c’est ici que je fais appel à vous.

À l’occasion des 12 jours d’action pour l’élimination de la violence faite aux femmes, du 25 novembre au 6 décembre, le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale organise un « Marathon des mots contre la violence conjugale ». Une course des mots, un grand rapatriement de nos courages individuels, une chorale d’indignation où les voix, toutes les voix, ont le droit de résonner.

Chaque semaine, depuis l’hécatombe, je vous lis, sur les réseaux sociaux. Dans les journaux. Dans les rues. Je vous entends et me réjouis. Vos prises de parole sont puissantes. Elles éveillent. Elles apaisent et insufflent courage et confiance à des dizaines d’entre nous de quitter une situation de violence conjugale. Ou peut-être même simplement d’en identifier l’existence.

Vos prises de parole mettent des mots sur l’indicible. Elles pulvérisent le mur de l’isolement, du silence et surtout, elles tissent l’espoir. Un espoir dont on se fait des manteaux.

C’est pourquoi je vous invite, les impétueuses comme les plus timides, à joindre votre plume à cette grande partition collective à laquelle joindront aussi leur voix les femmes hébergées dans les maisons d’aide et d’hébergement du regroupement.

Le coup d’envoi du Marathon sera donné le 25 novembre. À compter de cette date, utilisez vos tribunes. Prenez d’assaut les réseaux sociaux. En utilisant le mot-clic #Marathon12jours, la magie opérera : tous vos mots se mêleront…

La somme de nos voix sauve des vies. Ne la sous-estimez pas.

Au nom de toutes les femmes, je vous remercie du fond du cœur. Et à toutes celles dont le cœur et la vie vacillent peut-être aujourd’hui, sachez que vous n’êtes plus seules. C’est possible de s’en sortir. De respirer de nouveau. On ne vous laissera pas tomber. Jamais.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion