En ce 30 septembre, première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, mes pensées sont tournées vers tous les survivants des pensionnats indiens, tous les enfants qui n’en sont jamais revenus ainsi que toutes les familles concernées.

Je ne peux m’empêcher de remettre cette journée en perspective, notamment à la suite des échanges des représentants politiques des divers partis lors des dernières élections fédérales. J’ai suivi celles-ci sans grandes attentes, non pas par cynisme, mais plutôt par ce qui fait l’objet de débat dans la catégorie « enjeux autochtones ». D’ailleurs, en est-ce vraiment ?

Mais avant d’aborder cela plus en détail, je sens la nécessité de préciser un élément qui peut paraître anodin, mais qui mérite d’être dit et redit. Pour les avoir entendues à plusieurs reprises, il conviendrait de revoir l’utilisation de formulations du genre « nous avons un plan pour nos Premières Nations, pour nos Autochtones ». Est-il courant d'entendre « nous avons un plan pour nos Canadiens, pour nos Québécois » ? À moins de me tromper, il ne me semble pas que ce soit une tournure de phrase fréquemment utilisée.

Ainsi, la relation que nous voulons construire entre les peuples, cette forme de réconciliation recherchée, ce discours de nation à nation, cette égalité entre nous, passe avant tout, selon moi, dans notre manière de nous exprimer.

Je pense que prendre conscience de cet aspect pourrait avoir un impact sur nos manières d’agir et de nous comporter, mais aussi sur le respect que nous accordons à tous et chacun.

En juin dernier, la députée Mumilaaq Qaqqaq, représentant la circonscription du Nunavut, a livré une vibrante allocution1 à la Chambre des communes qui témoignait de toutes les barrières, des incohérences, de la discrimination, du racisme, du manque de considération auxquels elle a fait face au sein de cette institution. À quel point il est difficile de faire bouger le système en place, de se sentir considéré et respecté. Lors du déclenchement des dernières élections fédérales, j’ai cru naïvement que les propos de Mme Qaqqaq auraient résonné davantage. Que leur sens aurait été compris. Sans que j’aie une allégeance à un parti politique ou à un autre, elle a témoigné d’un ressenti vécu que plusieurs d’entre nous connaissons trop bien.

Alors que la localisation de dépouilles d’enfants ayant fréquenté les pensionnats indiens ne cesse d’augmenter, que des partages sur les réseaux sociaux de filles et de femmes autochtones disparues sont diffusés chaque JOUR, que des vagues de suicides emportent avec elles une partie de la jeunesse autochtone, que plus d’une trentaine de communautés autochtones n’ont toujours pas d’eau potable (dont certaines au Québec), qu’il y a un manque criant de logements salubres et abordables dans un grand nombre de communautés, que le prix de la nourriture dans le nord du pays est toujours aussi élevé, que faut-il donc de plus pour agir ?

Pour faire bouger la Chambre des communes, peut-être faudrait-il cesser de classer ces sujets comme des « enjeux autochtones » ?

– Avoir accès à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille est un droit – pensons ici à l’accès à de l’eau potable, à des logements salubres et abordables, à de la nourriture disponible à des prix raisonnables, à des soins médicaux, etc.

– Avoir accès à une éducation est un droit.

– Être protégé contre les menaces d’agression, à la sûreté de sa personne, est un droit.2

Ce ne sont là que quelques exemples des 30 droits de la personne fondamentaux inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Ceux-ci devraient être à la portée de toutes les personnes vivant au Canada, peu importe leur origine ou leur lieu de résidence.

Mais si nous voulons vraiment parler d’un enjeu autochtone et en débattre, la question de fond, à mon sens, a été posée par Marek McLeod lors du débat des chefs en anglais : « Comment puis-je faire confiance et respecter le gouvernement fédéral après 150 ans de mensonges et d’abus sur mon peuple ? En tant que premier ministre, qu’est-ce que vous ferez pour reconstruire la confiance entre les Premières Nations et le gouvernement fédéral ? » (traduction libre)

En toute transparence, la réponse que j’aurais souhaité entendre à la suite de la question de M. McLeod, c’est : nous reconnaissons que plusieurs droits de la personne sont bafoués en ce qui concerne les peuples autochtones et nous nous engageons à ce que votre existence soit tout aussi estimée que celle de toutes les autres personnes vivant au Canada. Et à traduire le tout en actions. Dès maintenant. Car un pays comme le Canada ne devrait pas tolérer des écarts en matière de droits de la personne.

D’ailleurs, n’est-ce pas de tels écarts que le Canada dénonce à l’international ? N’est-ce pas là une partie de la vérité ?

Wliwni (se dit olé-oné), merci !

Wli nanawalmezi ! Prends bien soin de toi !

1. Écoutez l’allocution (en anglais) de la députée Mumilaaq Qaqqaq 2. Lisez la Déclaration universelle des droits de l’homme Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion