La campagne électorale fédérale tire à sa fin. Nous avons eu droit à des débats enflammés sur le programme de garderies, le marché immobilier, les changements climatiques, la réconciliation avec les peuples autochtones… Les chefs des partis se sont chicanés sur plein de chiffres : les 28 milliards pour les transferts en santé, les 6 milliards pour les garderies au Québec, les pourcentages de réduction des gaz à effet de serre…

Dans tout ce brouhaha de promesses, je n’ai rien entendu sur un sujet qui me semble extrêmement important. Allez, je vous invite à consulter les programmes des grands partis pour trouver de l’information sur cette matière devenue taboue dans le discours récent de nos politiciens : la défense nationale. Les libéraux et les néo-démocrates offrent des vœux pieux, tandis que les conservateurs ajoutent un peu plus de détails, mais rien de rassurant.

Certains parmi vous seront même surpris qu’on mentionne la défense. Dernièrement, les Forces armées canadiennes se sont trouvées plus souvent dans les nouvelles pour des problèmes de harcèlement sexuel que pour leurs exploits militaires. D’ailleurs, nous défendre de qui ? La guerre froide est bel et bien finie !

Je n’ai pas pris le temps d’écrire ce texte d’opinion pour vous annoncer la quatrième guerre mondiale.

Des menaces pour la sécurité du Canada, il y en a, bien sûr, mais il s’agit surtout de regarder un trou où des milliards de dollars se sont enfouis et risquent encore de disparaître. Avez-vous dit 6 milliards pour des places en garderie ? Des pinottes…

En février 2021, le Bureau du directeur parlementaire du budget (DPB) a présenté un rapport sur le coût des nouveaux navires de combat de la Marine royale canadienne. Je vous invite à aller lire le rapport, mais, en attendant, voici le principal fait saillant du document : le DPB évaluait que la construction de la nouvelle flotte de 15 navires coûterait 77,3 milliards de dollars. Ce chiffre tout seul ne dit pas grand-chose, hein ? Attendez.

Quand le programme avait été lancé par le gouvernement Harper en 2008, le budget prévu était de 26,2 milliards. Neuf ans plus tard, sous l’administration libérale de Trudeau, le coût avait explosé pour atteindre les 62 milliards. Et maintenant, la meilleure nouvelle (encore ?). Si tout va bien, les premiers navires seront livrés dans l’année fiscale 2030-2031. Oui, vous avez bien lu : ça va prendre 22 ans pour faire construire un seul navire !

Avions de chasse

Et que dire du feuilleton des avions de chasse ?

Après avoir critiqué le gouvernement Harper pour la contribution du Canada au programme des F-35, les libéraux ont lancé un appel d’offres auquel ont répondu trois entreprises : Lockheed Martin (F-35), Boeing (Super Hornet) et Saab (Gripen). Quand le contrat sera signé en 2022 (si tout va bien, bien sûr), on a de fortes chances d’acquérir des… F-35 !

En passant, la dernière fois que le Canada a renouvelé ses escadrons de chasseurs – les CF-18 qui volent encore – a été en 1982, quand Trudeau père était premier ministre. Le coût total du programme actuel est estimé à environ 77 milliards de dollars.

Soyons clairs, les Forces armées canadiennes ont un besoin urgent de renouveler leurs navires de guerre et leurs avions de chasse, parmi d’autres besoins pressants, négligés par les libéraux et les conservateurs. De l’autre côté de l’Arctique, la Russie a commencé à rehausser sa capacité militaire et amasse une quantité impressionnante d’équipement. Les Russes vont réclamer sans aucun doute leur part du gâteau quand cet océan deviendra praticable pour la navigation commerciale à longueur d’année. Même la Chine se dit une nation proche de l’Arctique !

En attendant, que font les politiciens canadiens ? Ils se chicanent comme des enfants dans une cour d’école. La bande sonore de cette bagarre enfantine est le son du ruisseau de dollars payés par les contribuables pour d’interminables processus d’approvisionnement. Personne dans le gouvernement n’en parle publiquement, car c’est trop embarrassant.

Alors, si vous étiez déjà exaspéré par l’évident manque de vision et de respect pour votre argent de nos chers partis politiques, vous venez d’en ajouter une couche. Je suis vraiment désolé ! Peut-être que, dans le débat des chefs de 2050, on en discutera.

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