Les élections du 20 septembre détermineront si M. Trudeau passera à l’histoire ou n’aura fait que passer

Des Québécois ont peut-être été surpris, lors du Face-à-Face tenu jeudi dernier sur les ondes de TVA, de découvrir un Justin Trudeau non seulement combattif, mais au fait de ses dossiers, parlant un français impeccable et capable de naviguer sans problème dans les courants compliqués de la politique québécoise. Pourtant, ce Justin Trudeau-là, c’est Trudeau au naturel.

Malheureusement, le Justin Trudeau qu’on voit le plus souvent devant les caméras, c’est le Trudeau théâtral, déclamant des phrases écrites à l’avance, les yeux rivés sur l’objectif, avec le ton d’un tragédien d’un autre siècle. Parfois s’ajoutent un costume ou des larmes de circonstance.

Le Trudeau théâtral, c’est celui qu’a créé son entourage pour éviter que leur homme ne commette gaffe après gaffe, comme il le faisait dans les premières années de sa carrière politique. On l’a emprisonné dans des scripts.

Ce Justin Trudeau donne aussi l’impression que plutôt que de gouverner le pays, il se contente de participer aux conférences de presse et aux évènements internationaux, acteur se limitant à lire les textes qu’on lui soumet, sans en comprendre vraiment le sens ou la portée.

Certains de ses critiques en sont venus à le traiter d’« insignifiant ». L’accusation est injuste, mais le premier ministre lui-même l’alimente. On en vient à se demander qui est le vrai Trudeau ?

Un nouveau Laurier

J’ai rencontré Justin Trudeau à quelques reprises lors de ma carrière de journaliste, puis au cours de mon bref passage au Sénat. Chaque fois, il m’a impressionné par son charme et par sa maîtrise des dossiers nationaux et des enjeux locaux. Avant les élections de 2015, alors que j’étais éditorialiste en chef à La Presse, j’ai eu un long entretien avec lui au cours duquel nous avons décortiqué la plateforme de son parti. Il était solide comme le roc. Tellement qu’à la fin de l’entretien, lorsqu’il m’a proposé d’être candidat, j’ai hésité. « Cet homme-là, ai-je dit alors à un organisateur libéral, pourrait être un nouveau Wilfrid Laurier. » Rien de moins.

Sénateur, j’ai participé à des rencontres avec le premier ministre où il a fait preuve d’une connaissance détaillée de plusieurs sujets, notamment la réforme du Sénat, une question qui n’intéresse généralement que les sénateurs eux-mêmes. Encore une fois, je fus impressionné.

Irresponsables

Mais, également pendant que je siégeais à la Chambre haute, j’ai vu combien la nouvelle façon de faire de la politique, les « voies ensoleillées » empruntées à Laurier, n’était que de la frime : les libéraux sont prêts à bien des bassesses pour implanter leur programme et rester au pouvoir.

Et, bien avant la pandémie, j’ai vu sauter le cadenas de la rigueur budgétaire. Cela a mené à une orgie de dépenses comme on n’en a jamais vue dans l’histoire du pays. Pour ce qui est des dépenses publiques, les libéraux gouvernent de façon totalement irresponsable. Et le premier ministre laisse faire !

Se peut-il que lorsqu’il est question d’économie, M. Trudeau ne soit qu’une marionnette, vendant une salade qu’il n’a pas lui-même composée ? N’a-t-il pas dit récemment que la politique monétaire ne l’intéressait pas ?

Où est passé le politicien qui connaît ses dossiers à fond ? Il y a là une contradiction que je n’ai pas résolue.

On n’en parle pas en ces termes, mais ce double personnage de Justin Trudeau est l’un des enjeux de cette campagne superflue. Après six ans de politique spectacle et spectaculaire, des Canadiens se demandent si le temps n’est pas venu pour une gouverne plus sobre et plus modeste.

Planifiées de longue date par les stratèges du natural governing party, les élections du 20 septembre 2021 détermineront si Justin Trudeau passera à l’histoire ou s’il n’aura fait que passer.

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