Bon nombre d’organisations pataugent tristement dans le processus de retour au travail de leurs employés.

Une grande valse des hésitations, des consultations plus ou moins organisées et crédibles, des modalités hybrides floues qui laissent les employés dans la brume et l’anxiété, des communications vagues qui provoquent plus de questions que de réponses, le retour des employés précipite beaucoup d’entreprises dans une désorganisation inquiétante. Ajoutons au portrait l’importante proportion d’employés qui désirent changer d’emploi, alors que le manque de main-d’œuvre devient criant, force est de constater que le retour au travail est très mal parti.

L’urgence d’un regard plus holistique sur le retour au travail s’impose.

D’entrée de jeu, il importe de réaliser que le retour au travail n’est pas un retour à la normale et que l’organisation d’avant la pandémie n’existe plus. Trop de choses ont changé dans notre société. Il faut repenser l’organisation de demain, aujourd’hui… et c’est urgent.

Pour commencer, il s’avère judicieux de faire un retour sur la qualité de vie et les conditions de travail offertes aux employés avant la pandémie. Un environnement sain et stimulant ou un climat tendu ou toxique, des conditions de production performantes ou déficientes, un encadrement efficace ou inadéquat, des mécanismes de valorisation stimulants ou absents, tous ces éléments déterminent la performance globale de l’organisation et conditionnent la réaction des employés devant un retour partiel ou total ou, pire, un non-retour dans leur milieu de travail.

L’autre élément fondamental de cet examen de conscience est la façon dont l’organisation s’est comportée pendant la pandémie. S’est-elle préoccupée de ses employés, de leurs conditions familiales, de leurs installations physiques ? A-t-elle ajusté ses exigences de production à la nouvelle réalité qu’ils vivaient ? Comment a-t-elle géré les cas de COVID-19 de ses employés ? Comment se sont déroulées les communications et les relations de travail en mode virtuel ?

Les organisations dans lesquelles la gestion des ressources humaines se révèle peu performante doivent se pencher rapidement sur la façon dont elles comptent améliorer leurs relations avec les employés qui voudront revenir et ceux qu’ils recruteront à l’avenir. Cela peut même les obliger à amorcer une démarche de développement organisationnel qui repousse un retour hâtif, improvisé et désastreux pour le climat et la mobilisation des troupes (il importe alors de décréter un statu quo dans le travail à distance).

La préparation manquée vers une organisation accueillante et organisée – qui aurait dû être faite il y a plusieurs semaines – ne fait qu’accentuer les doutes des employés face à leurs employeurs et leurs désirs de retourner à leur vie professionnelle d’avant la pandémie.

Pourquoi quitter sa résidence sécurisante pour un milieu stressant, pressurisé, sans préoccupation de leur bien-être ni reconnaissance de leur dévouement ?

Sur certains aspects, le retour en présentiel après 18 mois d’absence ressemble à un retour au travail après une absence prolongée due à une maladie. Le confinement a permis l’installation d’une routine personnelle rodée où alternent plus ou moins harmonieusement travail et vie privée. Une bulle protectrice s’est formée contre les tensions naturelles du milieu du travail (stress, habillement, jugements des pairs, mini-conflits, courses folles entre le travail et la maison, préoccupations professionnelles du quotidien).

Les contacts sociaux ont été modifiés au point où, pour certains, les rassemblements entre collègues deviennent chronophages, alors que pour d’autres, ils sont aussi ardemment désirés que craints.

Le tissu social s’est affaibli, et les réflexes grégaires, ramollis.

Un retour au travail graduel et planifié, un soutien plus intensif du supérieur hiérarchique (lui aussi mieux préparé), des activités de groupe stimulantes pour reconstruire le tissu social et le plaisir du soutien du groupe, une promotion des valeurs de l’organisation et des comportements managériaux qui valorisent la personne s’avèrent incontournables. Enfin, beaucoup de reconnaissance et de compréhension, appuyées par un plan d’action solide, favorisent un sentiment de sécurité et de confiance et permettent de rebâtir la fierté et le lien d’appartenance. Notez que ce sont tous les ingrédients d’un développement organisationnel bien orchestré.

Le retour au travail postpandémique devrait être envisagé comme une renaissance de l’organisation plutôt qu’un simple horaire hybride de travail, sans véritable plan social, humain, de production et de mobilisation. Il est temps de voir la situation dans son ensemble et saisir l’occasion unique de propulser l’organisation et ses membres vers un futur meilleur.

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