La journée nationale du déménagement à Montréal approche à grands pas. Vous êtes en train de finaliser vos cartons. Le jour J, en fin de journée, ce sera pizza et bières pour les amis venus vous aider. Et puis, assis dans la cuisine en train de relaxer, vous observerez une bosse sur votre réfrigérateur. On le connaît tous, ce nouveau départ !

Tous… ou presque ! Malheureusement, il y a des gens pour qui déménager rime avec anxiété. Qui vivent avec le stress d’avoir été expulsés de leur domicile sans plan B. Qui vivent avec l’insécurité de ne pas avoir de toit sur leur tête. Ces gens, ce sont des hommes, mais aussi des femmes, désormais dans la rue. Chez Doris, un refuge pour femmes, c’est plus de 875 femmes itinérantes uniques que nous avons desservies entre avril 2020 et mars 2021. Une hausse de plus de 50 % de la clientèle itinérante par rapport à nos données pré-COVID-19.

Comment fait-on alors pour (re)loger ces 875 femmes, et plus encore, leur est-il possible financièrement de le faire ? Regardons les chiffres. En 2020, le montant des prestations d’aide sociale chaque mois était de 663 $. Or, le prix d’un loyer moyen dans le Grand Montréal a atteint 891 $ en 2020 (source : SCHL) et n’est qu’en progression depuis. Faites le calcul. Il manque 228 $ par mois. La solution se trouve-t-elle du côté des logements abordables ? Pas plus, puisque le taux d’inoccupation est de 1,6 % dans la région de Montréal.

En prenant en compte toutes ces données, il est évident que les femmes vulnérables, bien qu’elles reçoivent de l’aide sociale, ne peuvent se trouver un appartement à prix modique, et encore moins se permettre les autres dépenses essentielles… comme manger !

C’est pourquoi, avec la hausse substantielle du nombre de femmes itinérantes dans les rues montréalaises et la croissance du prix des loyers, nous devons miser sur des solutions durables pour les aider. Pour Chez Doris, il est clair que la construction de logements abordables et sociaux est une solution à long terme à la crise du logement. Cependant, avec des dates de livraison très éloignées, les logements abordables et sociaux ne répondent pas à l’immédiateté du problème. Il nous faut donc trouver d’autres solutions plus rapides. Vers quoi pouvons-nous alors nous tourner ?

Des besoins différents

Nous devons d’abord considérer le degré de responsabilité que ces femmes sont capables d’assumer. En effet, chacune a son histoire, ses défis, ce qui fait que leurs besoins sont complètement différents de l’une à l’autre.

Non seulement sont-elles confrontées à la hausse des loyers, et au risque de devenir itinérantes, mais certains antécédents de traumatisme, de violence, de pauvreté, de toxicomanie, de handicap physique ou de maladie mentale impliquent que certaines aient besoin d’un soutien psychosocial.

Un élément à prendre en compte dans les solutions amenées. D’où l’intérêt d’offrir une variété dans l’offre des logements, permanents ou non, ainsi qu’à court et moyen terme : refuge de nuit, chambre d’hôtel, chambre dans une maison d’accueil, appartement subventionné par le programme de logements subventionnés (PSL), ou le logement modulaire (idée développée à Vancouver pour répondre à l’augmentation du nombre de sans-abri). Il n’y a donc pas une seule solution à cette crise du logement, mais bien plusieurs.

La pandémie que nous venons de traverser aura mis en lumière, voire exacerbé de nombreux problèmes sociaux, dont le manque de logement ou encore les enjeux de santé mentale, dont les effets perdureront bien au-delà de la pandémie. Bien que des pistes de solutions existent pour aider à reloger les femmes itinérantes, l’aide financière demeure(ra) essentielle pour mettre en place de tels projets. Les gouvernements, autant provincial que fédéral, devront nous donner les moyens dans les prochains mois, voire les prochaines années, de reloger ces femmes et de les aider à redevenir des citoyennes à part entière. Et leur permettre, un jour, d’offrir de la pizza aux amis venus les aider à déménager.

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