Déjà le mois de mars. Fini le Mois de l’histoire des Noirs. Trente ans plus tard, est-ce encore pertinent de le célébrer ?

Le Mois de l’histoire des Noirs est reconnu officiellement depuis 1995 au Canada et 2006 au Québec. C’est donc un mois important : 28 jours d’opportunités, où l’on peut développer chez nos jeunes un esprit d’ouverture et de partage. Mais, il n’est pas dans le curriculum scolaire. Alors, libre à ceux qui veulent en parler dans leur école.

J’enseigne depuis plus de 20 ans dans une école primaire multiethnique, à Ahuntsic. Je l’aime, mon école ! Les projets mis en place ont une valeur pédagogique et sociale. On veut faire briller les yeux des élèves et les conscientiser au monde qui les entoure.

Je suis la seule enseignante noire à l’école. Ce mois m’a longtemps stressée. Je me demandais sans cesse : est-ce que j’organise une activité ?

L’année dernière, notre invité était l’artiste Webster. Ce fut un projet grandiose, mais surtout touchant. Les élèves étaient fiers de leur différence et se sentaient concernés par le racisme et l’injustice.

Cette année, mon rôle était plus qu’important.

La planète a réagi en voyant George Floyd se faire asphyxier par un policier complètement impassible. Concernés, ils ont marché en scandant Black Lives Matter. Fièrement, Kamala Harris et Dominique Anglade ont fait voler en éclats des plafonds de verre. Mamadi Camara et MKwado D. Yeboah sont encore abasourdis par les injustices subies. Et j’en passe.

Éducation et sensibilisation doivent être au cœur de ce mois de l’histoire des Noirs.

Munie d’œuvres de littérature jeunesse signifiantes, j’ai visité 18 classes afin de leur parler de l’histoire des Noirs du Canada et d’ailleurs. Au fur et à mesure que je tournais les pages, ils réalisaient que la couleur de leur peau peut être un désavantage. Leurs questions étaient parlantes.

— Mais Madame, pourquoi Ella Fitzgerald ne pouvait pas chanter partout ? Quoi, ils ont lancé des objets sur Willie O’Ree ?

— Madame, avez-vous déjà voulu changer votre couleur de peau ? Mais pourquoi les Noirs ne se défendent pas ?

Pourquoi donc ressasser le passé ? On dit que les enfants ne voient pas les différences. Pourtant, ils voient si quelqu’un porte des lunettes ! Il faut voir la différence pour être capable de l’embrasser ; parler de cette histoire pour qu’elle ne se répète plus ; dire que des Noirs ont beaucoup contribué à l’avancement de ce pays ; mentionner que cette histoire n’est pas racontée dans les livres scolaires.

Plus que jamais, cette histoire doit faire partie du curriculum scolaire. On ne peut pas laisser un sujet si important être vu à géométrie variable.

Mon Québec est multiethnique ; ça ne changera pas ! Il y a eu présence d’esclaves au Québec ; l’histoire le dit (voir Qc History X sur l’esclavage et la présence des Noirs dans la ville de Québec ou Black Montreal Experience)

> Consultez le site de Qc History X

Il faut la présenter correctement et donner aux enseignants les outils appropriés afin qu’ils soient capables d’enseigner l’Histoire des Noirs ; pas seulement parler d’esclavage.

Le Centre mondial du pluralisme, en partenariat avec la Commission canadienne pour l’UNESCO, a lancé De la réflexion à l’action : Aborder le racisme anti-noir dans les écoles canadiennes, un document politique qui recommande des actions concrètes aux leaders de l’éducation.

> Consultez le document du Centre mondial du pluralisme

De même que l’apprentissage en éducation à la sexualité est obligatoire, depuis 2018, il faut pouvoir enseigner à nos jeunes l’importance du Mois de l’histoire des Noirs.

Un enseignement adéquat sur l’histoire des Noirs a sa place dans le curriculum du ministère de l’Éducation dont la mission est d’instruire, de socialiser et de qualifier.

Réglons cela SVP !

On se voit en février 2022 pour la prochaine célébration.

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