Travailler en garderie est l’un des métiers les plus valorisants qui soient. Voir grandir, se développer et s’épanouir des tout-petits de 0 à 5 ans représente une grande source de fierté pour les éducatrices.

Malheureusement, à l’instar d’autres secteurs de la santé et de l’éducation, les conditions de rémunération des éducatrices en garderie sont plutôt précaires. Si c’est un peu moins vrai des éducatrices en CPE, qui bénéficient de conditions salariales plus généreuses, c’est assurément le cas de celles travaillant en garderies privées.

Syndiquées contre notre volonté

Naturellement, les employées qui œuvrent dans des milieux où les conditions salariales sont moins attrayantes constituent les meilleures cibles de recrutement des syndicats. Nous en savons quelque chose.

En effet, nous sommes 45 éducatrices — surtout des femmes — à travailler dans trois garderies de la Rive-Sud à être syndiquées depuis 2017. Nous le demeurons malheureusement encore aujourd’hui, contre notre volonté.

Il y a un peu plus de deux ans, une équipe de recruteurs du local 1991p des TUAC — syndicat affilié à la FTQ — est venue sonner à la porte de notre maison la fin de semaine pour nous faire miroiter la lune si nous acceptions de signer une carte d’adhésion syndicale au coût de 2 $. Pour au moins 50 % plus un, la proposition paraissait soit suffisamment alléchante ou l’insistance des recruteurs était trop forte. Dans certains cas, des recruteurs sont passés chez les mêmes employées à deux, trois ou quatre reprises durant la même fin de semaine.

Ce n’est que 48 heures plus tard — quand nous nous sommes retrouvées en garderie le lundi matin — que nous avons pris la pleine mesure de ce qui venait de se passer. Nous ne nous doutions pas à ce moment avoir commis l’irréparable. Nous avons tout de même choisi de prendre nos responsabilités et de donner une chance au syndicat de démontrer sa valeur.

À notre grande surprise, nous avons rapidement réalisé qu’au lieu de travailler pour nous, le syndicat s’était mis à travailler contre nous et qu’il allait s’acharner pour protéger son accréditation à tout prix.

La dernière tactique en liste du syndicat ? Utiliser un mécanisme juridique pour bloquer une demande de révocation syndicale signée par la quasi-totalité des employées en façonnant une impasse au dossier et en forçant le ministre du Travail à nommer un arbitre de différend — procédure qui a automatiquement bloqué notre demande de révocation.

L’heure du rééquilibrage a sonné

Le Code du travail prévoit certains mécanismes pour permettre à des employés d’obtenir une révocation syndicale. Nous avons tenté chacun d’entre eux, sans succès à ce jour. Nous avons multiplié les recours, auprès du Tribunal administratif du travail, auprès du ministre du Travail, Jean Boulet, et même du président du syndicat lui-même, qui a préféré rire de nos démarches plutôt que d’accepter de tenir un simple vote pour valider la légitimité de notre accréditation. La démocratie est-elle à sens unique ?

La liberté d’association est garantie au Québec et au Canada grâce à plusieurs chartes et lois.

Par contre, ce qu’on a découvert à nos dépens au cours des derniers mois, c’est que c’est beaucoup plus compliqué de se dissocier que de s’associer.

Le problème n’est pas que juridique ; même le Larousse ne reconnaît pas l’existence du verbe « désyndiquer », qui a pourtant un équivalent anglais bien répandu : deunionize.

Réviser le Code du travail

Comme en témoigne notre situation, il est grand temps que le Code du travail soit révisé et modernisé pour que des pouvoirs équilibrés soient donnés aux employés qui souhaitent sortir de leur syndicat et éviter les abus. 

Pour notre part, nous préférons laisser nos connaissances nouvellement acquises en droit du travail et en relations médias et plutôt retourner nous occuper de nos bouts de choux.

* Les signataires sont éducatrices en garderie et travaillent au sein des garderies Angelus, L’Ange-Rumiel et Les contes enchantés en Montérégie : Maude Borgia, Mary-Jo Brière, Nathalie Boudreau, Roxanne Benoit, Véronique Boutin, Anne-Katherine Charron, Claudia Desmarais, Marie-Ève De Sève, Mireille Dion, Marie-Ève Gosselin, Mélanie Houle, Sabrina Lecompte, Vanessa Maher, Mélissa Maheu, Suzy Mc Clean, Valérie Ouellet, Sophie Pellerin, Andrée-Anne Pepin, Dominique Russell, Isabelle Roux, Caroline Sirois, Jessica Sabourin et Marie-France Tremblay.

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