Au terme d’un procès sommaire mené à la hussarde, une condamnation irrévocable fut prononcée par contumace à l’encontre d’Yves Michaud, alors député à l’Assemblée nationale.

En décembre 2000, ce dernier avait prononcé une allocution devant la Commission des États généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec. Il traitait d’un sujet qui, à juste titre, préoccupe toujours l’actuel gouvernement : la francisation des immigrants.

Le lendemain, l’Assemblée nationale adopta – sans préavis – une résolution dénonçant sans nuance des propos inacceptables tenus par Yves Michaud à l’égard des communautés ethniques et en particulier à l’égard de la communauté juive.

Coiffé du bonnet d’âne raciste pour une macro-agression, Michaud tenta vainement d’obtenir justice. Texte en main, il soutenait que ses propos furent frelatés. Selon l’éditorialiste Bernard Descôteaux, du Devoir, on lui reprochait « d’avoir banalisé l’Holocauste alors que ses propos consistaient à rappeler que le peuple juif n’était pas le seul à avoir souffert dans l’histoire de l’humanité ».

Victime d’abus parlementaire, Yves Michaud sollicita l’écoute de ses contempteurs. Au printemps 2002, le gouvernement péquiste annonçait son intention de modifier les règles en vigueur.

Reconnaissant que l’Assemblée nationale n’est pas un tribunal, l’ex-ministre André Boisclair proposa d’interdire la présentation d’une résolution de blâme, sans que ne soit convoquée la personne concernée. Cette volonté de changer les règles parlementaires s’est dissoute en fin de session. Les élus se sont désintéressés du problème.

De guerre lasse, Yves Michaud s’est tourné vers la justice. Évoquant les privilèges parlementaires assurant aux assemblées législatives le contrôle exclusif de leurs débats et aux députés la liberté de parole, la Cour d’appel statua que notre droit constitutionnel empêche les juges d’examiner l’exercice des prérogatives parlementaires par l’entremise de la Charte canadienne des droits et libertés.

L’observation suivante de la plus haute cour du Québec en 2006 semble avoir sombré dans l’oubli.

« Pour préserver la démocratie parlementaire, et donc la libre circulation des idées, le Droit à l’époque des Chartes et de la prédominance des droits individuels permet qu’un individu soit condamné pour ses idées (bonnes ou mauvaises, politiquement correctes ou non, la chose importe peu), et ce, sans appel et qu’il soit ensuite exécuté sur la place publique sans, d’une part, avoir eu la chance de se défendre et, d’autre part, sans même que les raisons de sa condamnation aient préalablement été clairement exposées devant ses juges, les parlementaires. […] »

Quel paradoxe, disait la Cour. Michaud serait-il notre « Dreyfus » québécois ?

Qui n’entend qu’une cloche n’entend qu’un son ! Accusateurs et juges à la fois, les députés ont sonné la cloche sans entendre l’accusé. Au temps de l’Inquisition, les hérétiques étaient mieux traités. Dûment convoqués, ils recevaient un état des charges. Ensuite, ils pouvaient s’expliquer.

Peu importe sa forme, la censure est nocive. Instrument apprécié des sociétés autoritaires, sa première victime n’est pas le mal qu’elle veut gommer, mais la liberté d’expression.

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