« Jusqu’à quand enfin abuserez-vous de notre patience ? » Ainsi s’exprimait Cicéron dans un de ses fameux discours. La Santé publique a eu raison de la mienne en ce qui concerne la pratique des sports. On se croirait parfois sur une autre planète, là où des gens n’ont jamais pratiqué de sports.

Permettez-moi d’illustrer mon propos par un exemple personnel, mais qui s’applique sans doute à un très grand nombre de jeunes. Mon petit-fils pratique le ski, sport très dangereux, comme chacun le sait, pour attraper la COVID-19 : pratiqué à l’extérieur avec distanciation et avec un costume ressemblant à celui d’un cosmonaute. Imaginez-vous qu’il a eu le malheur d’être désigné meilleur skieur de sa catégorie dans les Laurentides et Lanaudière sur 180 athlètes. C’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que comme plusieurs autres il se prépare à sa nouvelle saison. Mais pas si vite, jeune homme. Tu as oublié les couleurs ! Tu demeures en zone rouge donc pas question d’aller t’entraîner dans les Laurentides, dixit la Santé publique.

Que l’on compromette sa saison d’entraînement et de compétition, cela n’a pas d’importance, même si son entraîneur est à 20 m de lui. Va plutôt skier seul, sur la même piste, avec un ami ou retourne à tes jeux vidéo. Par contre, ceux du club qui demeurent dans les Laurentides ou ceux qui ont un chalet dans la région pourront s’entraîner. Belle équité. Mais va t’entraîner en Ontario ou dans l’Ouest canadien, c’est permis, aucun problème. Reste celui de l’argent et de la fréquentation scolaire. Peccadille que tout cela.

Vous comprenez pourquoi j’ai perdu patience et qu’à mon tour je vois rouge.

Voilà où nous conduit le dogme des couleurs. Ce qui doit être un signal d’alarme est devenu le moyen de prendre des décisions. Car au-delà de la couleur, il faut la réflexion, au-delà du nombre, il faut analyser la provenance des éclosions, qui ne proviennent pas du sport en majorité.

La Santé publique fait la sourde oreille

Dans une lettre ouverte du 21 novembre concernant le sport de glisse cosignée par nos champions de ski, olympiens et entraîneurs, on rappelait que « le sport fait partie de la vie des jeunes et constitue la pierre d’assise de l’équilibre mental ». On demandait à la Santé publique d’autoriser l’entraînement et le ski de compétition. Pourquoi la Santé publique ne se fie-t-elle pas à ces experts ? Mais il y a la couleur !

Il semble bien qu’à la Santé publique, le problème de la pratique des sports est de peu d’intérêt et ne fait pas partie d’une grande réflexion.

Vous voulez un autre exemple ? Les jeunes hockeyeurs peuvent s’entraîner six à la fois avec un entraîneur, mais après la pratique, il y a patinage libre, maximum 30 personnes. Cherchez l’erreur.

Dans La Presse du 28 novembre, on trouve un excellent texte de Patrick Déry intitulé « Le temps pour un cabinet de guerre »* où l’auteur souligne l’importance de se référer à la science, aux experts et aux meilleures pratiques.

Faut-il répéter que depuis mars, tant en Asie qu’en Europe, de nombreux pays ont réussi à bien gérer la pandémie ?

Lorsque l’on fera place à la réflexion au lieu de la contemplation des couleurs, lorsqu’on visera l’excellence dans le contrôle de la pandémie, lorsqu’on mettra de l’avant l’avis des experts et de la science, alors peut-être ma colère s’estompera-t-elle.

Entre-temps, je vais continuer de voir rouge, car je ne peux admettre des décisions ridicules qui mettent en péril l’ambition des jeunes et l’élite de demain. Une saison de ski perdue pour ces jeunes ne se rattrape pas.

* Lisez « Le temps pour un cabinet de guerre »

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