La fin de semaine dernière, comme bien d’autres personnes ailleurs au Québec, nous avons installé nos lumières des Fêtes. Avec l’hiver en chemin et une pandémie qui continue de sévir, nous avons tous besoin de réjouissances hâtives cette année. Pourtant, dans notre foyer multiconfessionnel, l’activité avait une saveur douce-amère.

Avec la réalité d’une deuxième vague qui dérape, tandis que la loi 21, la Loi sur la laïcité de l’État, se retrouve devant les tribunaux, nous avons eu des discussions délicates avec nos enfants sur les raisons du gouvernement Legault de permettre aux gens de se réunir à Noël, mais pas à Hanoukka. N’est-il pas temps d’appeler un chat un chat ?

Le gouvernement actuel ne cesse de démontrer que les règles entourant la neutralité religieuse sont essentiellement une excuse pour reléguer aux oubliettes toutes les croyances, à l’exception d’une seule. Membres du corps enseignant, veuillez retirer tous vos symboles religieux, y compris les hijabs, les turbans et les kippas avant d’entrer à l’école Marie-Jésus-Joseph, fermée à Noël et à Pâques… Oh, mais ne vous inquiétez pas du crucifix pendu à votre cou, puisqu’il peut être dissimulé sous votre gilet. Qui tentons-nous de leurrer ? Présenter le Québec comme une société laïque est un affront à notre intelligence collective.

Dans cette province, sans que la CAQ ne sourcille, des milliers de familles de diverses convictions religieuses ont passé des mois à faire des pieds et des mains pour garder leurs distances et rester en sécurité à l’occasion de fêtes importantes comme la Pâque, Rosh hashanah, le ramadan, l’Aïd et diwali.

Toutefois, à l’arrivée de décembre, ce même gouvernement est prêt à faire fi des précautions, à ignorer les supplications des experts médicaux, à provoquer le désordre dans le système scolaire et à acculer le personnel de la santé au pied du mur, dans l’esprit de Noël. Quelle hypocrisie !

Ironiquement, pour empirer les choses, cette absurde situation fait l’objet d’un contrat moral. L’idée est à la fois sournoise et brillante puisque la CAQ tente une fois de plus de jeter de la poudre aux yeux de ses citoyens en se jouant de leur intellect. Sous le couvert de la prudence, tout en prétextant nous faire plaisir, le gouvernement a élaboré un plan pour se laver les mains des conséquences inéluctables de cette décision ridicule, en faisant appel au sens des responsabilités de sa population. Huit longs mois de pandémie n’ont-ils pas suffi pour comprendre que ceux qui enfreignent généralement les règles ne souscriront pas à toute recommandation ou à tout sens moral ?

La grande majorité ne prendra pas de risques, demeurera dans sa bulle, évoluera dans un univers social virtuel ou suivra la suggestion de se rencontrer en petits groupes dans le respect des mesures de sécurité en cours.

Toutefois, pour les personnes qui ne sont pas encore sorties de leur petite existence individualiste et qui continuent de mettre des populations vulnérables en danger, la présente décision consacre leur mauvaise conduite.

Rien de mieux qu’une célébration pour récompenser les comportements désolants. Heureusement, notre gouvernement semble avoir conclu un pacte avec la COVID-19 pour réduire de moitié sa période d’incubation. Dans le temps des Fêtes, l’isolement n’est que de 7 jours plutôt que de 14 ! Serait-ce une intervention divine ou simplement un coup de chance que le virus cautionne une société laïque comme la nôtre ?

Il ne fait aucun doute que les lumières multicolores qui s’allument un peu partout apportent de la joie dans un contexte autrement sombre et inquiétant. Peut-être que ces mesures festives permettront un certain contrôle dans une situation impossible à maîtriser. Ne soyons toutefois pas dupes de croire qu’un contrat moral permettant à la population du Québec de se réunir et de faire bombance du 24 au 27 décembre défend les valeurs d’une société laïque. Joyeuses Fêtes à tous.

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