Cette lettre s’adresse aux premiers ministres du Canada et du Québec, Justin Trudeau et François Legault, quant à l’admissibilité de travailleuses et travailleurs migrants au Programme spécial des demandeurs d’asile en période de COVID-19.

Messieurs, à la suite d’une forte mobilisation citoyenne, le gouvernement canadien annonçait, le 14 août dernier, la mise en place du Programme spécial des demandeurs d’asile en période de COVID-19, à l’attention des demandeurs d’asile ayant donné des soins directs dans les établissements de santé pendant la pandémie.

En raison de son caractère restrictif et de l’incompréhension de plusieurs à l’égard des limitations imposées par le gouvernement du Québec, ledit programme est depuis contesté par bon nombre de Québécois. Ainsi voit le jour notre Coalition pour la régularisation des statuts, un ensemble non partisan de citoyens et d’organisations québécoises qui œuvrent à accompagner et à défendre les droits des personnes principalement concernées par ce programme.

Au-delà de nos fonctions professionnelles et de nos champs d’expertise, nous sommes d’abord et avant tout des citoyens interpellés par ce que nous considérons être une injustice envers les travailleurs migrants qualifiés de toutes parts d’« anges gardiens » et ayant lutté pour maintenir le bon fonctionnement de notre société en temps de crise.

D’une part, nous demandons la mise en œuvre immédiate du Programme spécial des demandeurs d’asile en période de COVID-19.

Bien que le gouvernement du Canada ait annoncé ses intentions en dévoilant les critères d’admissibilité du programme, aucune date d’entrée en vigueur n’est annoncée. Parmi les personnes respectant les conditions actuelles d’admissibilité du programme, certaines sont à risque d’être renvoyées du pays si elles n’obtiennent pas rapidement un statut permanent. Les gouvernements doivent leur permettre de régulariser rapidement leur statut en ouvrant immédiatement le programme spécial. De plus, les renvois et les procédures d’asile des personnes admissibles au programme doivent également être suspendus pendant le traitement de leur demande.

D’autre part, notre Coalition pour la régularisation des statuts demande l’élargissement de l’admissibilité dudit programme afin d’inclure l’ensemble des travailleurs migrants occupant un poste répondant à la définition de travail essentiel énoncée par le gouvernement du Québec.

La ligne n’est pas difficile à tracer : une personne qui a travaillé dans un secteur essentiel – essentiel pour la santé physique, mais aussi mentale ou économique – doit pouvoir s’établir durablement au Québec. La lutte contre la COVID-19 repose sur l’effort collectif, tant celui des travailleurs en contact direct avec les patients que celui, pour n’en nommer qu’un, des préposés à l’entretien chargés de désinfecter les surfaces dans un CHSLD ou dans une épicerie. De ce fait, le programme spécial de régularisation doit refléter ce principe d’effort et de réussite collectifs, et donc être élargi.

Reconnaissant l’urgence de la mise en place d’un programme de régularisation des statuts qui soit réellement juste et équitable, nous vous demandons, MM. Trudeau et Legault, une rencontre afin de collaborer au déploiement d’une telle mesure. Dans un contexte de pandémie et de pénurie de main-d’œuvre dans les secteurs essentiels, notre société ne peut se permettre de perdre ces travailleurs qui sont déjà en première ligne de la lutte contre la COVID-19.

* Cosignataires : France-Isabelle Langlois, Amnistie internationale Canada francophone ; MGuillaume Cliche-Rivard, Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI) ; Ruth Pierre-Paul, Bureau de la communauté haïtienne de Montréal (BCHM) ; Ninette Piou, Centre N A Rive ; Frantz André, Comité d’action aux personnes sans statuts (CAPSS) ; Arcelle Appolon, Concertation haïtienne pour les migrant. e. s (CHPM) ; Ramatoulaye Diallo, Conseil central du Montréal métropolitain-CSN (CCMM-CSN) ; Marjorie Villefranche, La Maison d’Haïti ; Claire Launay, Le Québec c’est nous aussi ; Stephan Reichhold, Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI) ; Mouloud Idir, Vivre ensemble/Centre justice et foi

En appui à la Coalition pour la régularisation des statuts : Alexandre Boulerice, député de Rosemont – La Petite-Patrie à la Chambre des communes ; Andrés Fontecilla, député de Laurier-Dorion à l’Assemblée nationale du Québec ; Catherine Fournier, députée de Marie-Victorin à l’Assemblée nationale du Québec

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