L’ouverture d’une nouvelle conférence des Nations unies sur le climat est toujours l’occasion de se demander ce qu’on pourrait faire de plus, de mieux, autant pour réduire le bilan carbone mondial que pour s’adapter aux conséquences inévitables des changements climatiques.

Cette année encore, l’ONU a tiré la sonnette d’alarme pour nous rappeler que nous n’avons plus de temps à perdre : il faut agir.

Les municipalités sont aux premières loges face aux changements climatiques. Leurs infrastructures et leurs habitants en subissent les contrecoups, entre inondations, canicules et érosion accélérée. Elles sont aussi en première ligne pour créer des milieux de vie à la fois plus résilients et propices à un bilan carbone allégé.

En effet, les collectivités ne se développent pas au hasard ni selon le bon vouloir des promoteurs. Leur profil est encadré par un formidable outil : la planification en aménagement du territoire et en urbanisme. Les schémas d’aménagement et de développement, les plans d’urbanisme, les PMAD sont au service de la vision de développement des collectivités.

Les élus, les décideurs et les professionnels municipaux ont donc une réelle responsabilité dans notre bilan carbone en transport.

Le Québec accueillera, dans la prochaine décennie, près de 400 000 ménages supplémentaires. Où construira-t-on leurs 400 000 logements ? Là où leurs résidants auront accès à des commerces de proximité et à plusieurs options de transport ? Ou bien là où ils seront totalement dépendants de la voiture et condamnés à de longs déplacements, coûteux pour eux autant que pour l’environnement ?

Nous proposons une approche simple : orienter le maximum de la croissance attendue vers les milieux où le bilan carbone est déjà bon, et vers ceux où il présente un bon potentiel de réduction.

La plupart des collectivités québécoises disposent, au cœur même de leurs centralités et aux abords des réseaux de transports collectifs, de nombreux espaces sous-utilisés. Friches industrielles, stationnements de surface, bâtiments désaffectés : autant d’espaces disponibles pour accueillir la croissance sans avoir à s’étaler. Les ménages qui s’installeront dans ces milieux auront un bilan carbone aussi léger que les ménages existants sans avoir à faire d’efforts particuliers.

D’autres milieux présentent certaines caractéristiques favorables à un bilan carbone réduit : ils disposent déjà de quelques commerces et services, de rues « marchables », et il est possible d’y implanter des transports collectifs. L’accueil de nouveaux ménages peut s’y combiner à une amélioration du milieu de vie, par exemple en renforçant les commerces locaux. Ainsi, non seulement les nouveaux ménages, mais aussi les résidants existants pourront réduire leur bilan carbone.

Planifier pour le climat, c’est aussi ne plus faire tout ce qui creuse le déficit carbone.

S’étendre toujours plus loin au détriment des espaces verts, se développer aux abords du réseau autoroutier, construire des quartiers sans services de proximité, c’est ce qui a fait exploser notre bilan carbone en transport dans les dernières décennies. Sans parler du coût de nos infrastructures ! Il faudra, dans plusieurs cas, accepter de restreindre les périmètres d’urbanisation.

La planification en aménagement et en urbanisme doit aussi, et c’est urgent, intégrer la nécessité de s’adapter aux conséquences des changements climatiques. Pour renforcer leur résilience, nos collectivités devront notamment éviter les secteurs à risque, protéger leurs milieux naturels et leurs terres agricoles, adapter leurs infrastructures, maximiser le verdissement et mieux gérer les eaux pluviales. N’attendons pas d’autres catastrophes pour changer nos façons de faire.

Les municipalités sont en première ligne, mais elles auront besoin d’appui. 

Nous appelons l’État à les soutenir en créant dès maintenant un Fonds pour l’aménagement et l’urbanisme durables, doté d’un budget de 100 millions par année. Ce fonds pourrait soutenir la consolidation des noyaux villageois, la densification des axes de transports collectifs, la revitalisation des strips commerciales et la construction d’écoquartiers sur les friches industrielles. Les besoins sont nombreux et les acteurs locaux ont besoin d’un coup de pouce pour prendre le virage à la vitesse requise.

L’État devra aussi être exemplaire et faire preuve de cohérence et de vision. L’alliance ARIANE regroupe des experts, des ordres professionnels (OUQ, OAQ), des organisations d’intérêt public (Fondation David Suzuki) et est appuyée par plusieurs municipalités (Saint-Jean-sur-Richelieu, Montréal, Gatineau, Joliette, etc.). Elle réclame depuis quatre ans une Politique nationale d’aménagement du territoire pour le Québec. Nécessaire pour de multiples raisons culturelles, environnementales, économiques et sociales, cette politique est aussi une nécessité pour faire face à l’urgence climatique.

À toutes les échelles du territoire, nous devons dorénavant planifier pour et avec le climat.

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