Le 2 novembre dernier, au lendemain de l’Halloween, prise 2 dont on se souviendra longtemps, Maëlle, notre fille de 17 ans, cherche partout un cadre de son papi, mort d’une longue et pénible maladie dégénérative, il y a trois ans.

Elle a décidé qu’il était temps de rendre hommage à nos morts, comme on le fait dans la tradition mexicaine, entre autres. Sachant à quel point son papi aimait la vie et les chocolats, elle place quelques fruits chocolatés de sa maigre récolte de la veille devant la photo de son grand-père, le tout entouré de lumières en forme d’araignées, de deux fausses chandelles et de petites citrouilles qui décoraient le salon. La voilà satisfaite. Papi est avec nous, lumineux, souriant.

Maëlle est autiste et revient de loin, de très loin. Des morts, elle en a vu passer, jeunes et moins jeunes, malades comme elle.

Il y a 10 ans, pratiquement jour pour jour, notre fille a été foudroyée par une soudaine maladie neuromusculaire auto-immune qui n’a rien à voir avec l’autisme, l’empêchant d’avaler, de respirer, de boire, de voir, de sourire, de marcher, de parler. Pendant des années, elle a enduré et subi des centaines de traitements, de nombreuses rechutes, des hospitalisations, des interventions chirurgicales, en ne cessant de nous surprendre par son éternel optimisme, alors que, de mon côté, je sombrais la plupart du temps dans la dépression. Il y a des paroles, des sons, des images qui nous marquent à tout jamais.

Une nouvelle inespérée

Un jour, grâce à des traitements novateurs reçus au CHU Sainte-Justine, notamment au sein de la clinique d’immunologie et de l’équipe du Dr Élie Haddad, Maëlle a vu son état s’améliorer de semaine en semaine, puis de mois en mois, et nous voilà rendus à entrevoir la possibilité de cesser complètement les traitements dans un avenir proche. Quand le Dr Haddad est venu nous annoncer cette nouvelle inespérée, pendant que Maëlle recevait une transfusion d’anticorps il y a quelques jours à peine, je me suis mise à pleurer dans ses bras. Je n’oublierai jamais ce moment empreint d’émotions que même les mots ne sauraient traduire.

Alors que le mois de novembre nous prépare à l’arrivée de l’hiver, j’ai plutôt l’impression de respirer l’air d’un printemps trop longtemps attendu. En regardant notre Maëlle si pleine de vie et de projets rendre hommage à nos disparus, nous avons, de notre côté, levé notre verre à tous les vivants. Je n’ai alors pu m’empêcher de repenser aux paroles de Pierre de Ronsard et à ses vers criants de vérité : 

« Vivez si m’en croyez,

N’attendez à demain.

Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie. »

Sonnets pour Hélène

* Auteure de Soutenir et accompagner l’enfant malade – Maëlle et la Bête, écrit en collaboration avec le Dr Sylvain Palardy et le Dr Élie Haddad, Éditions du CHU Sainte-Justine, 2015

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