En réponse au texte de Julie du Page, « Ne jouez pas avec mes sentiments ! », publié dimanche

Julie du Page n’a pas manqué de souligner son indignation face aux « coûts faramineux » liés à ses visites chez le vétérinaire dans son dernier texte.

Elle mentionne même que « la moindre prestation est payante » et s’en étonne, ce qui m’étonne à mon tour. Vous connaissez beaucoup d’entreprises ou de professionnels, toutes catégories confondues, qui offrent des services ou des produits à leurs frais ? 

L’auteure déplore que les coûts des soins vétérinaires sont trop élevés et souligne qu’elle n’avait pas envisagé un tel budget pour son animal de compagnie, ce qui est bien irresponsable de sa part. D’ailleurs, il n’y a pas de factures à l’appui dans cette lettre d’opinion ; son chien a simplement fait quelques otites à répétition et maintenant, tout le domaine de la santé animale est responsable de ses « dettes ». Bon.

Je suis vétérinaire dans un centre de référence et je fais exclusivement de la chirurgie spécialisée. Puisque la plupart de mes patients sortent de l’hôpital avec une facture s’élevant à plusieurs milliers de dollars, ce texte m’a ébranlée et je dois y réagir. Avez-vous déjà vu cette image d’un dessin qui perd en qualité et qui est associée à la légende « when your client ask if you can do it cheaper » ? Ça illustre parfaitement la problématique soulevée par Mme du Page.

Oui, on peut réduire les coûts des soins vétérinaires. En réduisant la qualité de ces soins.

En évitant certains tests qui nous aideraient à établir le bon diagnostic. En croisant les doigts pour que le plan de traitement « loin d’être idéal » que l’on met en place va quand même fonctionner parce que oui, on aime les animaux. Si on réduit nos factures en ne facturant pas certains produits ou certaines procédures même si elles ont été faites, c’est l’établissement vétérinaire qui se retrouvera rapidement en déficit. 

Pas des bénévoles

J’espère sincèrement que ce n’est une surprise pour personne : les établissements vétérinaires sont des entreprises qui, comme toutes les entreprises, doivent être rentables pour continuer d’offrir des services, parce que leurs employés sont salariés et pas bénévoles, contrairement à ce que certaines personnes semblent penser !

L’intervention chirurgicale que je fais le plus souvent se nomme la TPLO. C’est une opération orthopédique pour stabiliser le genou des chiens dont les coûts s’élèvent à un peu plus de 4000 $ plus taxes. Ce n’est pas parce que je fais plusieurs TPLO par semaine que je trouve qu’une intervention à 4000 $, ce n’est pas coûteux. Ça l’est ! 4000 $, c’est une grosse somme d’argent. Il n’y a pas un vétérinaire qui vous dira le contraire.

Par contre, je trouve aussi que 4000 $, c’est un prix raisonnable par rapport au niveau de complexité de cette intervention chirurgicale, de l’expertise nécessaire pour bien la faire et des soins prodigués pendant l’hospitalisation de mes patients. La même situation s’applique à presque tous les aspects du domaine vétérinaire.

Les coûts sont élevés, mais justifiés. Les heures d’ouverture des établissements vétérinaires s’étirent pour répondre à la demande et ça, ça coûte cher. Les vétérinaires utilisent les mêmes technologies qu’en médecine humaine et ces appareils sont très dispendieux.

Alors, on fait quoi ?

On recule et on diminue la qualité des soins de santé animale ? On réduit nos heures sur le plancher ? On coupe les coins ronds ? Non.

On se renseigne sur ce que ça coûte avoir un animal de compagnie avant d’en adopter un. On se fait un budget. Encore mieux, on se prend des assurances et on a la tête tranquille. Et surtout, on arrête de blâmer les équipes vétérinaires qui travaillent fort pour donner des soins de qualité à vos animaux pour une fraction du prix de ce que l’on paye en impôts pour notre système de santé collectif.

Les vétérinaires sont des docteurs, pas des vendeurs. Notre vocation est de soigner et de sauver des animaux, et si on pouvait le faire sans avoir à parler d’argent, on serait les premiers contents.

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