Le drame de cette petite fille de 7 ans vient de secouer tout le Québec, les politiciens, les journalistes, les spécialistes, les parents.

Le Québec pleure cette enfant qui est morte parce que le système est profondément sclérosé, malade et même insensible parfois. Il a fallu ce drame pour encore une fois dénoncer les manquements de la DPJ, des tribunaux, des écoles et des policiers. Le filet social est fissuré.

Pendant ce temps, beaucoup d’autres enfants souffrent dans le silence, dont les miens, jusqu’au prochain drame.

Pourquoi ? Parce que les intervenants sont parfois impuissants face à Loi sur la protection de la jeunesse et que les jugements ne sont pas appliqués. Il y a du laxisme dans les suivis, faute de temps. Les intervenants ont par ailleurs toute la latitude pour décréter qu’un parent ne collabore pas. Et plus le parent est outillé et remet en question les services et l’application de la Loi, plus il risque de se faire taxer de parent non collaborant.

Je suis une mère scolarisée et responsable dont un enfant est sous la Loi sur la protection de la jeunesse depuis trois ans ; l’autre enfant ne l’est plus. La mort tragique de cette petite fille m’a mise en colère, car elle est loin d’être la seule à demeurer avec un parent violent et inapte à avoir la garde.

Sans trop entrer dans les détails, j’ai fait un signalement parce que j’étais au bout de mes ressources. J’ai eu de l’aide du CLSC, de l’école aussi, mais peu. Quand on fait appel à la DPJ, c’est qu’on a tout essayé. J’ai cru naïvement qu’on m’aiderait. J’ai été transparente, j’ai parlé de mon histoire, de la présence de violence psychologique post-séparation de la part du père en utilisant les enfants. Mon aîné se mettait en danger et on craignait pour sa sécurité.

Rien ne va plus

Aujourd’hui, rien ne va plus avec mon plus jeune enfant. Les intervenants se rendent compte que le père ment, manipule, fait du chantage émotif, se met en colère. Mes enfants ont peur de leur père, craignent ses menaces, ses accès de colère.

L’an dernier, la juge a vivement sermonné le père pour son comportement. Elle lui suggère de faire une thérapie. Mon enfant est quand même maintenu en garde partagée.

Un an plus tard, retour devant la cour avec la même juge. Mon enfant, qui allait passablement bien, prend aujourd’hui de la drogue, coule toutes ses matières, se fout de tout, est désinvesti. La juge sermonne encore plus sévèrement le père.

La DPJ suggère un placement en foyer de groupe ; j’aurais préféré le pensionnat, mais pour la haute direction que j’ai rencontrée, on me dit que c’est le statu quo ou le foyer, puisque mon enfant refuse ma solution. Aimez votre enfant et continuez de maintenir votre lien, me dit la direction. Faute de place en foyer de groupe, le juge maintient la garde partagée et ordonne une évaluation psychologique de mon enfant. L’été s’en vient, va-t-il vraiment avoir cette évaluation rapidement ? J’en doute.

J’ai demandé des suivis plus serrés de l’éducateur de la DPJ auprès de mon enfant il y a plus d’un an. Je suis inquiète, car il a déjà eu des pensées suicidaires. Les intervenants me disent de demander des services à l’école, ce que j’ai fait en écrivant des courriels et en appelant la direction.

Mon enfant a finalement eu une rencontre avec un éducateur. Ensuite, rien. Courriels à nouveau, appels, rencontre avec la direction. Des semaines s’écoulent, rien. Je relance, et mon enfant rencontre un autre psychoéducateur. Je rencontre à nouveau la direction de l’école, parce que le suivi est inexistant, et finalement, on me suggère d’aller au CLSC.

Vous voyez le portrait. Tout le monde se renvoie la balle. Cela rend fou ! Et pendant ce temps, mon enfant continue de souffrir.

J’ai remis en question la pertinence de poursuivre le suivi avec la DPJ. Mais on ne sort pas comme on veut de ce système.

Après 40 ans, la Loi sur la protection de la jeunesse a besoin d’être revue et d’être actualisée. On devrait s’informer des études les plus à jour de chercheurs sérieux en matière de violence conjugale ou de maltraitance, par exemple.

Le gouvernement a la volonté de revoir cette loi, mais il doit aussi consulter les experts qui se posent des questions sur les services de la DPJ depuis nombre d’années. Mais il faudra surtout injecter le budget nécessaire pour mieux protéger nos enfants et donner du temps et de la formation adéquate à tous ces travailleurs de la DPJ.

* Exceptionnellement, considérant que la famille est sous la Loi sur la protection de la jeunesse, nous publions ce témoignage sans signature.

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