Êtes-vous un bon ou un mauvais retraité? Personnellement, il m'est difficile de justifier de traiter un retraité différemment d'un autre. Eh bien, il semble que la fiscalité canadienne crée deux catégories de retraités: ceux ayant un régime de pension agréé et les autres. Voici le portrait d'une iniquité sur laquelle les autorités fiscales ferment volontairement les yeux.

Alexandre, le bon retraité, est policier. À 22 ans, il était déjà engagé par la Sûreté du Québec. Maintenant âgé de 57 ans, il décide de prendre sa retraite bien méritée. Ayant gravi les échelons de l'administration policière, il touche l'usufruit très appréciable d'un régime de pension agréé (RPA). Son conseiller financier lui mentionne qu'il n'a pas à s'en faire pour sa retraite puisque dès maintenant, il peut fractionner son revenu avec celui de sa conjointe ayant gagné la moitié de son salaire durant toute sa carrière. En sommes, dès 57 ans, le policier à la retraite peut attribuer une partie de son revenu à sa conjointe et ainsi épargner des milliers de dollars en impôts.

François, le mauvais retraité, a été travailleur autonome toute sa vie. Maintenant à l'aube de ses 58 ans, il décide de prendre sa retraite. La somme épargnée méthodiquement dans son régime enregistré d'épargne retraite lui permettra d'assurer ses vieux jours sans faire de folie. Étant voisin d'Alexandre, il discute avec ce dernier autour du barbecue. François est très heureux, il apprend de la bouche de son voisin qu'il peut fractionner son revenu avec sa conjointe ayant quitté le marché du travail il y a déjà cinq ans. Le lendemain, il appelle son conseiller financier tout heureux, mais ce dernier dégonfle rapidement son enthousiasme. Même s'il transforme son REER en fonds enregistré de revenu de retraite (FERR), il devra attendre 65 ans avant de pouvoir fractionner son revenu avec sa conjointe. François sort de ses gonds, il contacte le ministère des Finances du Canada. Rien à faire, il n'obtient aucune réponse justifiant cette iniquité.

En somme, on avantage les travailleurs bénéficiant des rentes issues d'un RPA. Que faire? Une première solution: augmenter pour tous l'âge minimal du fractionnement de revenu à 65 ans. Une autre solution: permettre aux épargnants détenant un REER de fractionner leurs revenus avant 65 ans. Une dernière solution: abolir le fractionnement, tout simplement. Mais, est-ce que les fonctionnaires du ministère des Finances remettront en cause une situation qui les avantage? Permettons-nous d'en douter.

En fait, cette question même du fractionnement de revenus a créé deux types de citoyens: les retraités et les autres. Avantager les retraités de 2013, c'est créer une injustice entre les générations. Pourquoi un père ou une mère de famille ne peuvent-ils pas fractionner leurs revenus avec leur conjoint? Les familles ne sont-elles pas une priorité électorale de M. Flaherty? Qu'en est-il des célibataires, pourquoi ne pas leur permettre de fractionner leur revenu avec un colocataire?

Le gouvernement canadien a créé des injustices à l'aide d'une fiscalité censée équilibrer le jeu. Pour l'instant, cette mesure semble favoriser une vision du couple des années 50: un conjoint à la maison et un sur le marché du travail. En 2013, les personnes vivant seules sont nombreuses et la vision l'utopie du couple «jusqu'à ce que la mort nous sépare» n'est plus la norme. La règle fiscale en vigueur n'est ni à gauche, ni à droite: elle est dans le champ.

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