Il y a deux choses très surprenantes dans le débat sur la hausse des tarifs de 3,9 % demandée par Hydro-Québec pour 2015. L'attention portée à l'éolien d'une part, et l'exclusivité de l'attention portée à l'éolien d'autre part.

Pourquoi, en effet, être surpris qu'il faille payer cette énergie éolienne plus cher que la majorité des approvisionnements d'Hydro-Québec ? En 2003, 2005 et 2009, le gouvernement du Québec a obligé par décret Hydro-Québec Distribution à faire des appels d'offres pour un total de 3500 MW d'éolien. Il a fallu du temps pour que les soumissionnaires préparent leurs offres, qu'elles soient étudiées, qu'on signe les contrats des offres choisies et enfin pour construire ces parcs éoliens.

Il était certain que les éoliennes couteraient plus cher que le bloc patrimonial (vendu à environ 3 ¢/kWh), donc que le prix final augmenterait. Aujourd'hui, près de 2 200 MW d'éoliennes produisent de l'électricité (coûtant à Hydro-Québec entre 5,8 et 14,8 ¢/kWh, selon les contrats), et 1100 MW sont encore en construction ou projetés. La partie de la hausse liée aux parcs éoliens est simplement expliquée par le fait que les producteurs des appels d'offres de 2003 à 2009 ont commencé progressivement à produire, et qu'il faut les payer.

Quiconque est surpris aujourd'hui de cette hausse devrait comprendre que c'est bien avant qu'il fallait se poser des questions : quand on a passé la commande, pas quand on reçoit la facture. Par ailleurs, pour que personne ne soit surpris l'année prochaine à pareille date, sachez qu'Hydro-Québec va encore exiger une hausse de ses revenus, et donc des tarifs, liée aux paiements des 1100 MW d'éolien qui sont à venir.

Une éolienne est généralement perçue comme un symbole du développement durable, et il y a des emplois reliés à sa construction. Rien n'est plus vendeur pour un politicien au Québec (ou l'était de 2003 à 2009) que d'annoncer que nous créerions des emplois en région, au nom du développement durable.

La facture étant payée en 2014 et 2015 par les consommateurs, ces annonces étaient alors des bonbons politiques, auxquels aucun politicien n'a réussi à résister. Que le Québec ait ou non besoin d'énergie, qu'il y ait ou non de meilleures manières de développer les régions, ces questions n'ont pas pesé lourd dans la balance qui a favorisé les appels d'offres éoliens.

Augmentation de la demande de pointe

Mais pourquoi porter attention seulement aux éoliennes ? Près de la moitié de la hausse demandée par Hydro-Québec ne leur est aucunement liée - il s'agirait plutôt de coûts engendrés par des « investissements dans le réseau », selon Hydro-Québec. Quand la demande d'électricité stagne et qu'on dit avoir des surplus... pourquoi investir dans le réseau ? Essentiellement parce que ce qui croit, au Québec, c'est la demande de pointe, l'hiver. Quand il fait froid et que tout le monde chauffe un domicile qui a tendance à être de plus en plus grand et de plus en plus loin.

Entre 1997 et 2010, cette demande de pointe a crû de 20 %, alors que la consommation n'augmentait que de 12 % (et la population de 9 %). Il faut donc toujours augmenter la capacité de distribution, et l'étendue couverte, parce que le Québec souffre d'étalement urbain. Ces investissements dans le réseau, utilisé pleinement quelques heures par années seulement, tout le monde les paie. Ne faudrait-il pas se questionner sur ce phénomène ?

S'il est facile de s'insurger contre l'éolien, et surtout d'arrêter de faire des appels d'offres, il est moins facile de remettre en cause cette obésité de réseau électrique que nous bâtissons. Il faudrait remettre en question notre manière de consommer l'électricité, notamment. Le vrai débat devrait porter là-dessus, et sur la bonne manière de créer des emplois au Québec, et non pas seulement sur la nouvelle de la facture qui arrive.

Peut-être que 2015, avec la nouvelle politique énergétique du Québec, sera l'année d'un vrai changement, et non pas seulement celle d'une hausse de 3,9 % du prix de l'électricité.

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