On dira ce qu'on voudra, mais Benyamin Nétanyahou a gagné son pari. Non seulement le parti Likoud du premier ministre d'Israël se retrouve en première place pour une deuxième fois consécutive, mais son vote augmente par rapport aux élections de 2009 et 2013. Une victoire personnelle pour Nétanyahou, résultat d'une campagne fondée sur la peur, devant une opposition divisée.

Les sondages l'avaient enterré, la presse internationale se moquait, et de nombreux gouvernements occidentaux souhaitaient sa défaite. Les électeurs en ont décidé autrement. Nétanyahou demeure au coeur de l'échiquier politique. Son parti est le premier choix des Israéliens. Il a résisté aux scandales, aux défections et à l'usure du pouvoir, alors que les autres partis n'en finissent plus de se recomposer et de se diviser. La principale force de l'opposition, l'Union sioniste, alliance de dernière minute entre le Parti travailliste et la formation de Tzipi Livni, a remporté un maigre 19% des voix, contre 24% pour le Likoud.

Mais ce n'est pas tout de gagner, encore faut-il savoir quoi faire de la victoire. Et là, «Bibi» offre du pareil au même sur la scène intérieure et une vision apocalyptique en politique étrangère.

Israël est une des sociétés les plus dynamiques du monde industrialisé. Son économie est en pleine expansion grâce aux nouvelles technologies et à une classe entrepreneuriale énergique. Cette carte postale a toutefois un revers, et il est sombre. Selon Paul Krugman, Prix Nobel d'économie, la société israélienne est, après l'américaine, la plus inégalitaire des pays développés. La pauvreté a doublé en 10 ans et frappe particulièrement les Arabes et les juifs ultraorthodoxes. La vie chère, la corruption et la pénurie de logements ont été au coeur de l'élection. Aucune amélioration n'est en vue.

Sur le plan politique, Nétanyahou a polarisé la société entre conservateurs et libéraux, mais aussi entre juifs et Arabes. À la veille du scrutin, il a joué la peur auprès de l'électorat juif en brandissant l'épouvantail du «vote arabe» se ruant sur les urnes, incité en cela par les partis de gauche. Cette tactique lui a certainement gagné quelques voix, mais quel en sera le prix plus tard pour les relations entre juifs et Arabes, des citoyens israéliens comme les autres?

Politique étrangère

C'est sur des questions de politique étrangère que Nétanyahou a fait le plus de bruit et certainement réussi à gagner cette élection. La sécurité d'Israël est demeurée le thème central de sa campagne. L'ennemi numéro un, c'est l'Iran, avec son programme nucléaire. Il s'agit pour le premier ministre d'une menace «existentielle» pour le pays et cette obsession l'a conduit à une confrontation sans précédent avec le président Barack Obama lorsqu'il s'est adressé au Congrès le 3 mars dernier à l'invitation des républicains.

Avec les Palestiniens, le premier ministre a rompu les liens. Il a promis qu'il n'y aurait pas d'État palestinien sous sa gouverne, revenant ainsi sur sa position de 2009 où il avait accepté le principe de deux États indépendants vivant côte à côte.

Ses déclarations sur l'Iran comme sur la Palestine interviennent au moment où la communauté internationale cherche à désamorcer ces crises afin de se concentrer sur la lutte contre le terrorisme et sur la stabilisation de l'Irak, et de trouver une solution à la guerre civile en Syrie et au chaos en Libye.

Benyamin Nétanyahou peut savourer sa victoire, mais elle pourrait être de courte durée. Le système politique israélien réserve bien des surprises et même celui qui arrive en tête peut être déclassé si une coalition d'opposants réussit à obtenir une majorité au Parlement.

Reste que, Nétanyahou ou pas comme premier ministre, le plus dur est à venir. Le prochain gouvernement devra s'attaquer aux problèmes économiques et sociaux et renouer avec les Palestiniens, les États-Unis et la communauté internationale.

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