Mardi, l'Assemblée nationale française a adopté une résolution invitant le gouvernement de François Hollande à reconnaître l'État de Palestine. La résolution n'a aucune valeur contraignante, et seul le pouvoir exécutif est en mesure de reconnaître un pays.

Néanmoins, le vote des parlementaires français s'inscrit dans une série de mesures similaires adoptées par plusieurs législatures en Europe et visant, pour ses partisans, à redonner une nouvelle vie au processus de paix israélo-palestinien. Pour les opposants, ces votes sont symboliques et ne favorisent pas la conclusion d'un accord de paix.

Le gouvernement palestinien a fait de la reconnaissance de l'État de Palestine un élément clé de sa stratégie afin de débloquer des négociations qu'il estime entravées par le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. Le vote français n'est en fait qu'un épisode d'une campagne amorcée il y a plusieurs années et qui a mené à l'entrée de la Palestine aux Nations Unies à titre d'État observateur en 2012. À cette époque, le nombre de pays reconnaissant la Palestine est passé d'une centaine à 130.

Ce beau succès diplomatique est cependant demeuré incomplet. En effet, très peu de pays occidentaux, surtout les plus importants, ont reconnu pleinement la Palestine. Tout au plus, reconnaissent-ils l'Autorité palestinienne et lui accordent-ils un statut diplomatique. Le président Mahmoud Abbas veut forcer la main des Occidentaux et les amener à franchir le pas vers la reconnaissance pleine et entière de son État. D'où la campagne actuelle qui consiste à convaincre les parlementaires européens de faire pression sur leur gouvernement en adoptant des résolutions favorables à cette reconnaissance.

Et la campagne fonctionne, même auprès de pays traditionnellement pro-israélien. Ainsi, le 13 octobre, les parlementaires britanniques de toutes tendances politiques ont adopté une résolution similaire à celle de leurs collègues français. Deux semaines plus tard, la Suède est allée plus loin et est devenue le premier grand pays occidental à reconnaître l'État de Palestine.

Contrer la haine

Les politiciens britanniques, français ou suédois invoquent deux raisons afin de justifier leur geste: leur profonde exaspération face à l'impasse entre Israéliens et Palestiniens et leurs craintes de voir un Proche-Orient déjà secoué par le terrorisme et les conflits civils et religieux «s'embraser», comme l'écrivent les anciens ministres des Affaires étrangères français et espagnol Bernard Kouchner et Miguel Angel Moratinos. La reconnaissance, écrivent-ils, peut relancer les négociations et enrayer l'«engrenage des haines et des confrontations».

Cette justification est rejetée par les opposants à la reconnaissance. Ils font valoir qu'elle va rendre le dialogue plus difficile et qu'elle contrevient à l'esprit et à la lettre des négociations de paix dont la finalité est justement la création d'un État palestinien et sa reconnaissance après la conclusion d'un accord.

Les arguments des uns et des autres se valent et chacun choisira son camp selon la lecture qu'il fait des événements qui secouent le Proche-Orient depuis si longtemps.

Toutefois, une certitude demeure: l'État palestinien existe, même si l'occupation israélienne entrave sa pleine liberté d'action. Il réunit, comme le stipule la déclaration de Montevideo de 1933, les quatre conditions d'existence d'un État: une population, un gouvernement, la capacité d'entrer en rapport avec les autres États. Quant au territoire, les Palestiniens en contrôlent une partie, mais son statut définitif et ses frontières restent à déterminer.

L'occupation et l'absence de statut définit et de frontières définies sont-elles des obstacles à la reconnaissance? Certainement pas, puisque l'acte de reconnaissance est d'abord et avant tout un geste posé par un État afin de soutenir politiquement une autre entité étatique, aussi imparfaite soit-elle. C'est tellement vrai que le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a promis de reconnaître la Palestine si une nouvelle négociation israélo-palestinienne étalée sur deux ans devait échouer.

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