Dans quelques jours, les États-Unis et la Russie vont annoncer la date d'une conférence à Genève sur la guerre en Syrie. Mais une conférence pour quoi faire au juste?

Le conflit en Syrie entrera dans sa quatrième année en janvier prochain, et bien malin qui peut dire comment il se terminera. En 2011, à la faveur du printemps arabe et de la chute des dictateurs tunisien, égyptien et libyen, diplomates et observateurs occidentaux comptaient en jours le temps qu'il restait au président Assad de Syrie avant de tomber. Eh bien, non seulement il n'est pas tombé, mais il sort renforcé de son épreuve de force avec les États-Unis sur la question des armes chimiques et semble gagner du terrain sur une opposition rebelle en plein désarroi.

Les lignes ne cessent de bouger dans le conflit syrien. L'attaque chimique du 21 août dernier avait soulevé une vive émotion dans le monde, et plusieurs pays, dont les États-Unis et la France, étaient sur le point de lancer une frappe punitive contre le régime de Damas, accusé du crime. Un accord de dernière minute entre Washington et Moscou est venu relâcher la tension et relancer le processus de paix, jetant du même coup le trouble au sein de l'opposition. Les groupes rebelles misaient gros sur l'intervention militaire. Ils espéraient en profiter pour conquérir de nouvelles positions et même menacer le pouvoir à Damas. Aujourd'hui, ils accusent les Occidentaux de les avoir abandonnés.

Cette situation a des conséquences politiques dramatiques pour l'opposition qui se présente désormais en ordre dispersé face aux futures négociations de Genève. Déjà, les combattants sur le terrain sont divisés en plusieurs groupes, dont certains sont maintenant inscrits sur la liste des organisations terroristes internationales. Ils ne seront pas à Genève.

Pour sa part, le Conseil national syrien de Georges Sabra, visage présentable de la rébellion et groupe le plus important de l'opposition, a annoncé qu'il ne participerait pas à la conférence. Le chef du Conseil a prétexté les souffrances endurées par la population pour justifier cette décision, mais on voit bien qu'il encaisse mal le revirement occidental. À Genève, la délégation de l'opposition, s'il y en a une, risque d'être faible et non représentative.

Le président syrien joue de ces divisions et s'interroge même à haute voix sur son éventuelle candidature à sa succession lors des élections de l'an prochain. Assad ne peut avoir l'air de laisser tomber, histoire d'encourager ses partisans, mais il sait bien que les Russes ne tiennent plus à lui et cherchent une porte de sortie élégante au clan présidentiel.

La conférence de Genève a justement pour objectif de planifier cette sortie. Elle doit mettre en oeuvre une entente conclue l'an dernier prévoyant la création d'un gouvernement de transition qui dirigerait la Syrie le temps de préparer des élections démocratiques.

Sur le papier, tout cela est joli. Mais la réalité est bien différente. L'opposition - celle qui compte - ne sera pas à Genève et le régime Assad a bien l'intention de monnayer chèrement le départ du clan présidentiel en obtenant un partage du pouvoir à Damas. Sur le terrain, les combattants, particulièrement les djihadistes, n'ont absolument pas l'intention de se laisser ravir un pouvoir qu'ils estiment être à portée de main.

Quels que soient les résultats de la conférence de Genève en novembre, ils risquent d'être en décalage par rapport à la réalité. La prise du pouvoir en Syrie sera tout sauf pacifique, et le conflit va se poursuivre même après le départ du régime Assad. À cet égard, la Libye offre un bon exemple du chaos et du désordre qui surgissent après des violences.

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