Non, personne ne pense sérieusement à démolir le Stade olympique de Montréal. Oui, c’est un monument architectural et c’est devenu une signature de Montréal. Quoi qu’on en dise, ça restera l’un des édifices marquants de la deuxième moitié du XXsiècle.

Mais c’est exactement ça, le problème du Stade olympique. Comme monument, c’est une grande réussite. Comme stade, comme lieu de rassemblement pour des évènements sportifs ou culturels, c’est un gigantesque fiasco.

Bref, dans ce débat, il y a trop d’architecture et pas assez de stade.

Ce stade n’a jamais tenu ses promesses. Le toit rétractable n’a jamais fonctionné. L’acoustique est absolument horrible. Et son principal défaut sur le plan sportif, c’est que les spectateurs sont beaucoup trop éloignés de la surface de jeu.

On sait que le Stade n’est plus aux normes pour recevoir la Coupe du monde de soccer, un match préparatoire de la Ligue nationale de football ou un concert de la tournée de Taylor Swift. Bref, ce n’est plus un stade adapté aux demandes actuelles des promoteurs d’évènements et des consommateurs.

Ce n’est pas pour rien que les deux équipes professionnelles qui pourraient l’utiliser – les Alouettes et le CF Montréal – ont choisi de s’établir ailleurs.

Même si c’est un monument architectural, le Stade est un fiasco technologique. Il serait – si ça marchait ! – le seul stade à toit rétractable au monde où le toit se déploie de façon verticale : du haut de la tour vers le bas. Tous les autres toits rétractables sont à l’horizontale.

Le problème, évidemment, c’est que ça marchait sur la maquette de l’architecte, mais ce fut un échec retentissant dans la réalité. On pourrait dire que c’est le péché originel du Stade. Si on veut en savoir plus, on peut aller lire le rapport du juge Malouf, qui reste totalement d’actualité1.

Depuis, on a installé deux toitures qui n’ont pas pu résister aux intempéries. On ne fera pas la même erreur une troisième fois.

Le prochain toit du Stade sera fixe, mais il faut savoir qu’on va ainsi pérenniser un des grands défauts du Stade : le fait qu’en plein été, les gens seront dans une enceinte fermée. Quand les Expos voulaient construire un stade au centre-ville, c’était entre autres pour ça : par un beau soir de juillet, les amateurs n’avaient pas envie d’aller s’enfermer…

Pour vendre des billets, les équipes sportives misent sur ce qu’on appelle l’expérience client. Il faut que les amateurs aient une belle soirée : que le lieu soit agréable, que les sièges soient confortables, que l’offre de restauration soit intéressante.

Tout cela pour dire que s’il faut absolument remplacer l’anneau technique sur le toit du Stade et y ajouter un toit fixe, il y aura beaucoup d’autres dépenses à faire pour remettre le Stade olympique aux normes du jour.

Ce qui signifiera revoir les installations pour les concessions alimentaires, un nouveau système de sonorisation et d’éclairage, changer les inconfortables sièges de plastique, entre autres. Si on veut y attirer de grands évènements, ces dépenses seront incontournables.

Juste changer l’anneau technique devrait coûter entre 750 millions et 1 milliard de dollars. On ne sait pas encore combien le toit fixe pourrait coûter. La dernière estimation date de 2017 et on parlait alors de 250 millions. Il est évident que ce sera beaucoup plus.

Ce qui est encore plus inquiétant, ce sont les annonces de cette semaine. On va retirer la surface de jeu pour aller vérifier l’état de la structure et du béton.

« Les travaux exploratoires qui seront réalisés incluent notamment des analyses de conception, d’ingénierie et d’architecture, des relevés, des carottages, des inspections, de même que l’entretien préventif du système de drainage de l’enceinte », dit le communiqué du Parc olympique.

On ne sait pas ce qu’on va trouver, mais une recherche comme celle-là n’augure rien de bon et la facture risque d’être encore plus salée.

Alors, au lieu de nous servir les mauvaises nouvelles à la petite cuiller, il serait temps d’avoir une vision globale de ce que va coûter la mise à niveau du Stade.

Ensuite, on pourra faire un débat qui est inévitable : est-ce que le Stade olympique est condamné à être un gouffre sans fond pour l’argent des contribuables ou pourra-t-il, un jour, recommencer à attirer de grands évènements ?

Cependant, pour que ce débat ait lieu, il faut sortir de la logique toxique suivante : puisque le Stade a coûté tellement cher, on ne peut pas arrêter de dépenser encore un peu plus. Ça fait presque 50 ans que ça dure et ça n’a plus de sens.

Ensuite, on répondra à la véritable question : veut-on un stade vivant, donc un équipement collectif utilisé pour le sport et la culture, ou un monument architectural, qu’on ne regarde que du dehors, parce qu’il ne se passe plus rien dedans ?

1. Consultez le rapport du juge Malouf