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De plus en plus de gens prennent connaissance des valeurs nutritives inscrites sur les produits comestibles afin d’établir leur menu et d’avoir une alimentation saine. Tous les produits comestibles doivent porter une étiquette indiquant les valeurs nutritives à l’exception des produits alcoolisés. Pourquoi ?

Daniel Bonner, Ham-Nord

Vous saviez qu’il peut y avoir autant de calories dans certaines canettes de bière que dans un petit sac de chips ? Et qu’il existe des vins de dessert deux fois plus sucrés que du Coca-Cola ?

Si vous avez répondu non, c’est normal : les informations nutritionnelles ne sont pas affichées sur les produits alcoolisés.

C’est un manque à corriger.

Pourquoi obliger les fabricants de tisane et de kombucha à dévoiler les valeurs nutritives de leurs produits, mais pas les fabricants de bière, de vin et de spiritueux ?

Afin d’obtenir une réponse, nous avons d’abord interrogé le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, qui s’occupe de l’étiquetage des aliments au Québec.

Erreur.

« Au Québec, la Loi sur les produits alimentaires et le Règlement sur les aliments encadrent la production d’aliments, incluant les breuvages qui comportent 0,5 % d’alcool ou moins. Lorsque cette limite est dépassée, c’est la Loi sur la Société des alcools du Québec qui encadre les pratiques », nous a-t-on répondu.

Du côté de la SAQ, on nous a renvoyé vers la réglementation... de l’Agence canadienne d’inspection des aliments.

Le règlement fédéral prévoit en effet une « exemption » pour les produits qui contiennent 0,5 % d’alcool et plus, ces derniers n’étant donc pas tenus de présenter un tableau sur la valeur nutritive.

Il y a des exceptions. Un produit qui contient des édulcorants artificiels, par exemple, doit afficher ses valeurs nutritionnelles. Même chose si, pour des raisons de marketing, l’étiquette fait référence à la teneur en sucre ou en calories du produit. On peut penser à la bière Michelob Ultra, par exemple. Sur la caisse, on affirme que chaque canette de 355 ml ne contient que 90 calories et 3 g de glucides. Un tableau complet des valeurs nutritives y est donc aussi affiché.

Il est aussi obligatoire de déclarer les allergènes prioritaires, les sulfites et le gluten pour toutes les boissons alcoolisées.

Santé Canada explique que les boissons alcoolisées sont exemptées des exigences réglementaires, « car il a été déterminé que les décisions relatives à la consommation d’alcool étaient complexes et que l’alcool ne devait pas être associé à des avantages nutritionnels positifs ».

Bien sûr, personne ne veut inciter les gens à aller chercher leurs nutriments dans la bière, le vin ou le whisky plutôt que dans les aliments. Mais il reste que ces boissons contiennent des calories et du sucre, notamment, et que les consommateurs ont le droit de savoir combien ils en ingèrent quand ils lèvent le coude.

C’est d’autant plus vrai que les valeurs nutritives peuvent varier grandement d’une bière à l’autre et d’un vin à l’autre, ce qui rend l’analyse très complexe pour les consommateurs qui voudraient savoir ce qu’ils boivent. Du côté des bières, une stout contient beaucoup plus de calories qu’une ale. De façon générale, plus le pourcentage d’alcool augmente, plus le nombre de calories augmente. Alors qu’une bière ordinaire de 355 ml contient environ 150 calories, le compte peut doubler à 300 calories pour certaines bières de spécialité, selon le site MedlinePlus des National Institutes of Health américains1.

On observe des variations encore plus grandes dans le contenu en sucre des vins. Si certains ne contiennent presque pas de sucre résiduel, un rosé comme le Gallo White Zinfandel en contient 37 g par litre. Du Coke, en comparaison, contient environ 100 g de sucre par litre. Un vin de glace comme celui de l’Orpailleur affiche 220 g de sucre par litre.

Non, ce ne sont pas tous les buveurs qui scruteraient les tableaux de valeur nutritionnelle affichés sur les bouteilles d’alcool. Mais ceux qui voudraient le faire devraient avoir accès à cette information afin de faire les meilleurs choix pour leur santé.

1. Consultez le site MedlinePlus des National Institutes of Health américain (en anglais)