Révélé sur la scène internationale grâce à The Broken Circle Breakdown, qui l'a mené aux Oscars, Felix van Groeningen propose aujourd'hui Beautiful Boy. Le premier film en langue anglaise du cinéaste belge met en vedette Steve Carell et Timothée Chalamet, deux acteurs au sommet de leur art. Conversation avec un cinéaste pour qui l'authenticité des émotions prime le reste.

Beautiful Boy est inspiré des deux livres qu'ont publiés David Sheff et son fils Nic, dans lesquels les deux hommes relatent leur propre expérience face à la toxicomanie de Nic. Comment en êtes-vous venu à réaliser ce film?

On m'a présenté ce projet. J'ai d'abord lu les deux livres, et j'ai pu rencontrer les deux auteurs. L'approche de leur histoire était unique à mes yeux, vraiment. Comme la famille se trouve au coeur de ce récit, et les effets qu'a sur elle la présence de quelqu'un aux prises avec de graves problèmes de toxicomanie, j'ai pu prolonger l'exploration de thèmes que j'ai déjà abordés dans mes films précédents. Personnellement, j'ai été vraiment très touché par cette histoire. On pense pouvoir trouver des solutions à force d'amour et on n'arrête jamais de se battre, même quand on constate que le problème est au-dessus de nos forces. J'ai voulu en faire un film très personnel.

Vous avez rencontré les «vrais» personnages de votre film, pour ainsi dire. N'avez-vous pas vu là une obligation de rester fidèle à leur vérité dans un film de fiction? Même dans une volonté de faire un film très personnel?

J'ai rencontré David et Nic au tout début, avant même d'écrire le scénario. Ils avaient déjà vu The Broken Circle Breakdown et ça leur a donné confiance. On s'est parfois revus à l'étape de l'écriture, car je pouvais trouver auprès d'eux une authenticité à laquelle je n'aurais probablement pas eu accès autrement. Cela dit, ils ne sont jamais intervenus dans ma démarche. À l'arrivée, on fait du cinéma. Il faut que l'ensemble fonctionne en tant que film de fiction. Ce qui m'importait surtout était de garder l'esprit de leur histoire et que le coeur y soit. Ils adorent le cinéma et ils ont parfaitement compris comment ça fonctionne.

Steve Carell et Timothée Chalamet offrent des performances dignes de citations aux Oscars. Comment se sont-ils intégrés au projet ? Aviez-vous déjà l'intention de leur offrir les rôles en écrivant le scénario?

Je préfère ne pas penser aux acteurs au moment où j'écris. Je dirais même que Steve est arrivé beaucoup plus tard dans le processus et, pourtant, il s'est révélé remarquable. Il est parfait d'intériorité et il amène le trajet de son personnage de père de façon très juste et très précise. De son côté, Timothée, malgré son jeune âge, est déjà un acteur d'exception. Au moment où nous lui avons confié le rôle, Call Me by Your Name ne l'avait pas encore révélé. Il n'y a pas de formule, mais je tiens à prendre le temps qu'il faut pour faire des répétitions avec les comédiens avant le tournage. Cette étape est très importante, car elle nous permet d'essayer plein de choses et de choisir une direction à prendre. Quand on lit et qu'on discute autour d'une table, les acteurs commencent déjà à intérioriser leur personnage. C'est aussi le moment pour régler des questions à propos du scénario.

Beautiful Boy est le premier film que vous tournez en anglais, à l'extérieur de la Belgique. Cela fait-il vraiment une différence?

Ça m'intéressait d'aller travailler en Amérique, mais je ne savais pas si j'allais pouvoir m'y sentir bien. Là-bas, j'ai rencontré plein de gens intéressants, qui sont animés d'une vraie passion. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les Américains sont sensibles à ce qui se passe dans le domaine du cinéma ailleurs dans le monde et ils sont ouverts aux cinéastes étrangers, à qui ils font une belle place, ce qui est assez remarquable. Cela dit, j'ai voulu bien prendre mon temps afin de trouver le bon projet. J'ai aussi voulu m'entourer de gens qui me laisseraient aborder mon film de la même manière que si je l'avais fait en Belgique.

C'est ce qui est arrivé?

Évidemment, on ne peut y arriver à 100 %, mais je suis super content de mon expérience, et super fier de Beautiful Boy. J'ai pris le temps d'écrire le scénario moi-même et de faire ce film comme je voulais le faire. J'ai surtout voulu retrouver l'émotion que j'ai moi-même ressentie en lisant les bouquins. Je crois que nous y sommes parvenus.

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Beautiful Boy (Un garçon fantastique en version sous-titrée française) prendra l'affiche le 26 octobre.

Photo tirée du film

Timothée Chalamet et Steve Carell dans Beautiful Boy, un film de Felix van Groeningen