Après son passage au Festival du nouveau cinéma, la comédie Au poste! de Quentin Dupieux arrive en salle avec un Benoît Poelvoorde en grande forme dans le rôle d'un inspecteur de police teigneux. En entrevue, le réalisateur explique pourquoi il a eu envie de tourner un huis clos.

Qu'est-ce qui vous a intéressé dans cette idée de comédie centrée sur un interrogatoire?

Avant le sujet, j'étais attiré par l'exercice de style, à savoir un huis clos sur un interrogatoire, qui est quelque chose de très cinématographique. Un flic qui interroge un suspect est tout aussi cinématographique qu'un avion sur le point de s'écraser. Il y a des clichés au cinéma, mais on a quand même envie de s'y frotter. Dans le cas présent, j'avais très envie de me frotter à la pièce de théâtre.

Justement! Jusqu'où va la part de théâtre dans ce film?

Avant d'en assurer le financement, ma femme et moi avons pensé à le faire sur scène, car c'était un exercice de comédie. Il aurait suffi de répéter cette pièce, que les comédiens la maîtrisent parfaitement et qu'on la filme une seule fois pour en faire un film [dans les faits, le tournage a duré cinq semaines]. Pour un metteur en scène, il y a un vrai challenge à pouvoir tenir la route avec des comédiens dans un huis clos.

Quel est le risque?

C'est un exercice périlleux. On peut très vite ennuyer les spectateurs avec un huis clos. Au détour de chaque réplique, on peut perdre leur attention, car les gens sont habitués à être stimulés. Moi, ça m'intéressait de faire un huis clos de qualité avec des comédiens toujours au top.

Sentez-vous une responsabilité d'être différent, original?

Pas du tout. La seule vraie responsabilité est de faire, consciencieusement, de la qualité. De nos jours, avec n'importe quel équipement basique, on peut faire quelque chose de diffusable. Mais plusieurs le font par-dessus la jambe. Faire de belles choses, sans même avoir un point de vue personnel ou être différent, pourvu que ce soit sincère et bien fait, c'est beaucoup. Si, en plus, ça fait écho chez les gens, c'est mieux. 

En quoi Benoît Poelvoorde donne-t-il une âme au commissaire Buron?

J'ai exploité sa lassitude. Benoît est un comédien génial, mais qui a été délavé par le métier. Il a beaucoup donné d'énergie au cinéma. J'ai rencontré chez lui un mec un peu las, avec moins de flamme. Ça ne signifie pas qu'il n'est plus enjoué. Il était très heureux de faire le film, mais on sent que le cinéma l'a rincé, l'a usé. J'ai réussi à réactiver son excitation et à détourner sa lassitude. Je l'ai canalisée vers son personnage, un policier qui en a marre. C'est peut-être sa dernière enquête.

Un peu comme Coincoin et les Z'inhumains de Bruno Dumont, votre comédie fait dans l'absurde. C'est une tendance actuellement dans la comédie française?

Je ne crois pas. Nous sommes plutôt dans une époque où il y a beaucoup de comédies de la quarantaine, sur des mecs qui trompent leur femme. Quelques-unes sont bonnes [il nomme Le sens de la fête], mais certaines sont vraiment merdiques.

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Au poste! est présentement à l'affiche.

Photo fournie par Axia Films

Benoît Poelvoorde dans une scène d'Au poste !