Le petit Boston terrier erre dans les rues. Soudain, une main. Qui tient une frite. La dépose sur le trottoir. L'animal renifle. Avale. Remue la queue. D'autant que la main, généreuse, dépose une autre frite. Qu'il avale. Ainsi naît l'amitié entre un homme et le chiot qu'il baptisera Winston.

Feast, court métrage de Patrick Osborne qui précédait les projections de Big Hero 6 de Don Hall et Chris Williams (deux productions Disney en nomination aux Oscars), résume en six minutes une douzaine d'années de leur indéfectible amitié.

Ce, sur un air de grande bouffe.

À l'origine de ce «festin», celui dont le travail a été récompensé par une statuette dorée en 2013, pour Paperman.

«Patrick est de ces gens qui aiment expérimenter, indiquait la productrice Kristina Reed lors de rencontres de presse tenues au moment de la sortie de Big Hero 6. Ainsi, pendant une année, il a utilisé l'application 1 Second Everyday pour prendre quotidiennement une photo de son souper. Au bout d'un an, il a regardé ce film et s'est rendu compte que ces images livraient un témoignage de ce qu'il avait vécu au cours des 12 mois précédents.»

Un récit hermétique pour tout autre que lui, toutefois. Il s'est alors demandé à travers quel personnage il pourrait raconter, de façon plus universelle, cette histoire mettant la nourriture en valeur. Il a alors pensé à un chien, ces animaux étant des êtres de routine: ils mangent à la même heure, sortent à la même heure, etc.

C'est ainsi qu'est née cette histoire où la caméra a été placée à hauteur d'animal et où la nourriture trône au centre de chaque image. On suit ainsi Winston, promu du plancher au divan, du divan à la table, de la table familiale à celle du restaurant.

Puis, la dégringolade. Lorsque son maître tombe amoureux.

2D et 3D main dans la main

«Très intéressant de raconter en six minutes la relation d'un homme et d'une femme en voyant principalement... un chien et sa nourriture», s'amuse Kristina Reed qui avait aussi produit Paperman, pour lequel a été développé Meander, un programme grâce auquel le dessin traditionnel 2D et le fruit du numérique 3D se mêlent parfaitement. Il est ici, pour la première fois, utilisé pour un film en couleurs.

Le résultat, dans le cas de Feast, est «géométriquement très plat, présente des textures simples qui ne tentent pas d'être réalistes. Mais le tout est éclairé de façon tridimensionnelle afin de donner l'impression au spectateur qu'il peut marcher dans cette rue, s'asseoir sur ce sofa ou caresser ce chiot».

Ce qui semble par contre très vrai est le comportement de Winston: Patrick Osborne tenait à ce que le chiot, qui grandit au fil du film, bouge et agisse comme un chien - ne lui «permettant» de s'anthropomorphiser que le temps d'une scène (clé) du récit. Lorsque, pour la première fois, l'animal regarde son maître dont il perçoit la peine (d'amour) et «décide» de sacrifier ce qu'il aime (la nourriture) pour le bonheur de l'homme.

«À partir de là, les aliments ne sont plus au centre de l'image - ni de la vie de Winston - et ils tentent même de se mettre en travers de la mission du chien», note Kristina Reed, mettant ainsi en relief à quel point tout est pensé dans ces petites bulles d'animation.

Celle de Feast, bien sûr, se termine bien pour tous. Un véritable régal. Grâce à une finale aussi craquante qu'une (bonne) frite.

Les courts métrages de fiction et d'animation en nomination aux Oscars sont présentés au Cinéma du Parc, jusqu'au 5 février. Parmi eux, Me and My Moulton de Torill Kove, produit par l'ONF.

Les frais de voyage ont été payés par Walt Disney Studios Pictures.