Lancé vendredi au Festival du film de New York, le nouveau film de David Fincher est à la fois un drame conjugal, un «meurtre et mystère» et une satire féroce des médias. Sans oublier le fameux sourire de Ben...

Considéré comme l'un des maîtres contemporains du cinéma américain, David Fincher aime préserver ses mystères. Il n'accorde pas beaucoup d'entrevues. Il ne participe pratiquement jamais non plus aux rencontres de presse organisées par les studios.

À l'occasion de la sortie de son nouveau film, le réalisateur de Seven est quand même un peu sorti de sa tanière et a consenti une (longue) interview au magazine Playboy. À l'invitation de la British Academy of Film and Television Arts (BAFTA), le cinéaste s'est aussi prêté récemment à Londres à une séance de questions et réponses dans le cadre d'une série d'entretiens publics intitulés A Life in Pictures.

Depuis, les publications spécialisées n'ont de cesse de partager les déclarations d'un cinéaste qui, estiment-elles, se fait décidément trop rare sur le plan médiatique.

Après avoir porté à l'écran The Girl with the Dragon Tattoo, le premier tome des romans de Stieg Larsson Millénium, et lancé la plus célèbre série de Netflix House of Cards, Fincher propose aujourd'hui l'adaptation cinématographique de Gone Girl, le roman à succès de Gillian Flynn.

À Londres, le cinéaste relevait en outre le travail remarquable de l'auteure, qui a elle-même adapté son roman pour le passage au grand écran. Elle en signe seule le scénario.

«Gillian a un don, je crois, a déclaré Fincher. Elle a pu prendre ce roman touffu de 500 pages, très structuré, et jeter 380 de ces pages aux poubelles! Elle est arrivée avec un script qui reposait sur des éléments inédits. Je n'avais jamais vu une description comme celle-là au cinéma auparavant. Ça commence comme un mystère, ça tombe ensuite dans le thriller absurde pour aboutir ultimement à une satire. Il est rare de voir quelqu'un jongler avec des éléments disparates de cette façon et en faire un exercice de haute voltige.»

De Brad à Ben

Au journaliste Stephen Rebello, Fincher a révélé offrir d'abord les rôles masculins de ses films à Brad Pitt, un acteur qu'il a déjà dirigé dans Seven, Fight Club et The Curious Case of Benjamin Button.

«Non pas parce que je suis lamentable, mais parce que Brad est bon dans tout.» Il estime en outre que Pitt et Ben Affleck partagent par défaut le même côté «affable». «Aucun des deux ne veut te voir mal à l'aise», dit-il.

Aussi, il avoue avoir choisi Affleck sur la foi d'une scène clé du roman de Gillian Flynn. Laquelle devait obligatoirement se retrouver dans le film. Au cours d'une conférence de presse organisée au lendemain de la disparition de sa bien-aimée, à la demande des médias, Nick Dunne - mari parfait - pose devant une affiche où figure le visage de celle que l'on recherche. Et il sourit.

«J'ai fait une recherche sur Google et j'ai trouvé une cinquantaine d'images dans lesquelles Ben apparaît avec ce sourire au cours d'événements publics. Vous regardez ça et vous savez qu'il essaie simplement de faire plaisir aux gens à cet instant. Mais du coup, il prête aussi flanc à d'autres perceptions que le public peut avoir de lui.»

Effort supplémentaire exigé

Réputé perfectionniste, David Fincher peut exiger des dizaines de prises d'une même scène. Certains acteurs apprécient; d'autres moins. Jake Gyllenhaal et Robert Downey Jr., vedettes de Zodiac ont déjà évoqué publiquement leurs réserves à propos de cette méthode.

«Je dis aux acteurs qu'il se peut très bien que la 11e prise d'une scène soit bonne au point de pouvoir être retenue, fait remarquer le cinéaste dans l'interview publiée par Playboy. Nous pourrions tous en être contents, mais je veux quand même en faire sept autres et voir où cela va nous mener. Je peux très bien revenir et concéder ensuite que c'était une perte de temps. Mais j'estime que nous devons essayer. Je suis conscient que cela demande un effort supplémentaire de la part des acteurs et qu'ils travaillent parfois plus fort avec moi qu'avec d'autres. Mais je veux qu'ils soient heureux du fait d'avoir pu accomplir quelque chose de singulier, quelque chose qui se distingue de tout ce qu'ils ont fait ailleurs.»

Gone Girl, sans contredit l'un des films les plus attendus de l'automne, a ouvert vendredi le Festival du film de New York.

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Gone Girl (Les apparences) prend l'affiche le 3 octobre.