Il est allé vivre à Toronto pour étudier la langue de Shakespeare mais n'y a appris qu'un «anglais de service». Il a étudié en robotique et en philosophie mais gagne sa vie en étant acteur et scénariste. Il émane de lui une impression de bonheur alors qu'il crève l'écran par sa froideur et son cynisme dans la peau du Vétérinaire de Nitro. Rencontre avec un homme qui sait tirer le meilleur des chemins de traverse.

Martin-David Peters était en première année. Le professeur avait demandé à tous les petits de fabriquer une marionnette. Un bâton de Popsicle, deux morceaux de carton. L'affaire était dans le sac. Pour les autres. Pas pour Martin-David. Lui, a donné une histoire à sa marionnette. L'enseignant a à ce point apprécié que le garçon s'est retrouvé dans le gymnase, pour présenter son numéro aux élèves des autres classes.

Il a eu la piqûre ce jour-là. «Mais en grandissant, je suis passé de la marionnette au break-dance», s'amuse le comédien de 39 ans qui incarne le Vétérinaire dans le film Nitro d'Alain DesRochers. Un rôle court, deux jours de tournage, mais percutant. C'est en sa présence que Max (Guillaume Lemay-Thivierge), à la recherche d'un coeur pour sa bien-aimée, prend le virage après lequel la marche arrière ne sera plus envisageable.

Le Vétérinaire en question n'est pas vétérinaire. En tout cas, ce n'est pas à ce titre qu'il s'est bâti une «clientèle» parmi les motards et autres criminels. «Il est l'un de ces médecins venus d'ailleurs dont les qualifications ne sont pas reconnues au Québec», résume Martin-David Peters. Une situation d'actualité, plus encore aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a un an, au moment du tournage.

Troublant. Comme bien des coïncidences survenues sur le parcours de celui qui est né à Montréal d'une mère francophone originaire de l'Abitibi-Témiscamingue et d'un père anglophone né au Québec de parents antiguais, qui a grandi à Québec et fait ses études à La Pocatière. Mais ces coïncidences, comme autant de traverses sur son chemin, ne l'ont pas déstabilisé ni fait trébucher. Elles lui ont plutôt donné un élan.

Ainsi, il étudiait en robotique au cégep quand sa copine du moment est allé étudier le théâtre à Sainte-Thérèse. Elle lui a proposé de la suivre. Il a préféré terminer son DEC et est entré à l'Université Laval. En philosophie. Et sa copine de revenir à la charge. «Je suis très curieux et beaucoup de choses m'intéressent. Ça m'a pris du temps avant de me décider.»

Il a franchi le pas à la fin de sa première année universitaire. A été accepté à Lionel-Groulx. Y a passé un an. S'est fait dire qu'il n'était pas prêt pour continuer... mais qu'il pouvait, s'il le voulait, refaire sa première année. Il a refusé. Par orgueil. A passé les auditions au Conservatoire. Y est entré. Pour en sortir en 1994. Et, à partir de là, enligner les rôles. Sur les planches, au Théâtre du Nouveau Monde et à la Compagnie Jean-Duceppe. À la télévision, dans Jamais deux sans toi et Les héritiers Duval. Au cinéma, dans J'en suis! de Claude Fournier.

«Mais j'ai bientôt eu l'impression de tourner en rond. Je n'avais jamais voyagé, je ne parlais même pas anglais. Je suis parti pour Toronto.» Où il s'est immédiatement intégré... à la communauté francophone. Autant pour la langue de Shakespeare, dont il a quand même appris la base. Mais bonjour l'expérience (au théâtre et à la télé) et les rencontres - entre autres, avec celle qui, d'origine montréalaise, partage sa vie depuis plusieurs années.

C'est parce qu'ils ont commencé à parler d'avoir des enfants que Martin-David Peters - que l'on verra à l'automne dans la série Les soeurs Elliot - est de retour au Québec. Les liens familiaux sont importants pour celui qui est maintenant papa d'une petite Julia. C'est d'ailleurs l'un des arcs dramatiques qui, pour lui, comptent énormément dans Nitro. La relation entre Max et le petit Théo. Et la relation de Max avec son père (Raymond Bouchard).

Peut-être parce que lui, n'a pas grandi avec le sien. «Il faisait le service sur les trains de Via Rail, entre autres à l'époque où les joueurs du Canadiens se déplaçaient en train», mentionne-t-il. Et on sent-là une histoire. Que Martin-David Peters, qui est aussi scénariste, pourrait peut-être écrire un jour. S'il bifurque sur un autre chemin de traverse. Après tout, jusqu'ici, cela l'a bien servi.