À 85 ans bien comptés, depuis hier, Charles Aznavour dit: «Il faut toujours tenter des expériences.» La toute dernière? Doubler pour la première fois un personnage de dessin animé dans le nouveau film de Pixar, Là-haut, version française de Up.

Charles Aznavour n’a pas hésité longtemps quand on lui a proposé de doubler en français le personnage de Carl, héros de Up (Là-haut, en version française), le premier dessin animé en trois dimensions de la compagnie Pixar qui a ouvert le Festival de Cannes la semaine dernière. «Je crois qu’il faut toujours aller un petit peu vers l’inconnu, on ne peut pas toujours vivre sur ses lauriers. Ce film-là n’est pas une question de vie ou de mort, mais il comporte quand même un risque professionnel», a expliqué le monument de la chanson française au moment de son passage à Montréal le mois dernier.


Le matin de son quatrième récital en autant de soirs à la Place des Arts, Aznavour a rencontré la presse montréalaise en compagnie de Rachid Badouri qui prête sa voix au chien Dug, dont le collier techno lui permet de parler comme un humain. Le plus célèbre des chanteurs français a fait le service après-vente avec une bonne humeur, un humour et un sens de l’autodérision remarquables.


Dans Up, le vieux Carl voit sa maison emportée dans les airs en direction de l’Amérique du Sud par des ballons multicolores. Un jeune scout, Russell, sera de l’aventure bien malgré Carl.
«Carl a 78 ans, il est donc plus jeune que moi, mais pour râler, pour grogner, c’est à peu près la même chose, a raconté Aznavour dans la suite d’un hôtel montréalais. Il est nettement plus petit que moi – ça m’arrange –, il boit moins bien que moi et il entend mieux, mais on a quand même des choses en commun.»


Disney, qui emploie des acteurs québécois pour doubler tous ses films ici, a eu l’idée d’utiliser la voix reconnaissable entre toutes d’Aznavour qui doublait déjà le film en France. On lui a réservé cinq jours de studio, il a fait le travail en deux jours et quart à raison de cinq heures par jours, «pas plus».


«Comme je n’avais rien lu – si je lisais tous les scénarios qu’on me donne, je n’aurais plus le temps de vivre – j’ai découvert le personnage, ses émotions et ce qui lui arrivait dans la continuité, dit-il. Ça m’a permis de construire ce personnage. Il veut vivre tranquillement dans la maison qu’il s’est construite avec sa femme disparue, où il a ses souvenirs, mais tout d’un coup on démolit tout ça pour mettre du béton. Comme il est marchand de ballons, il trouve l’idée de partir avec sa maison. Cet homme égoïste, qui n’a pas d’enfant et surtout pas de chien, sera confronté à un enfant et à des animaux.»


Aznavour est impressionné par le «degré de vérité confondant» que permet la technologie moderne: «La manière de dessiner le personnage, de lui donner des réactions, des sentiments et une mimique, ça vous le rend familier. C’est l’homme du palier à côté quoi.»
Les acteurs qui font du doublage travaillent un peu dans l’ombre même si, au Québec, Disney inscrit leurs noms sur l’affiche du film, alors que les voix de la version originale anglaise n’ont pas droit à pareil traitement.


Pour Rachid Badouri, qui en est à sa troisième expérience, l’essentiel est ailleurs. «Pour quelqu’un qui est fan du cinéma, quand on fait ce travail-là, on est dans une bulle, explique le jeune humoriste. Tu te retrouves vraiment dans le film, c’est une expérience que tu ne peux pas connaître même si tu vas au cinéma. Vers la fin, je demandais ce qui allait arriver au chien, je vivais le suspense.»


Au Québec, 25 des salles où sera projeté Up dès vendredi prochain sont équipées pour la 3D. Le spectateur doit toutefois porter des lunettes spéciales pour profiter pleinement de l’effet de profondeur de l’image.

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Up (Là-haut en version française) prend l’affiche vendredi.