Josiane Balasko a la tête dure. Suffit de lui refuser un projet pour qu'elle fonce avec davantage de détermination, envers et contre tous. Ç'a été le cas pour Cliente, où la comédienne et réalisatrice a surmonté plusieurs obstacles pour en arriver à porter à l'écran l'histoire jugée immorale d'une quinquagénaire qui se paye les services d'une escorte masculine.

De passage à Québec, jeudi, afin de présenter son septième long-métrage qui met en vedette Nathalie Baye et Éric Caravaca, l'ex-membre de la troupe du Splendid explique qu'il lui a fallu écrire un livre sur ce sujet pour le moins audacieux afin de voir une porte (et les portefeuilles) s'ouvrir.

«J'ai écrit le roman afin de pouvoir faire le film. Pour des raisons de morale, le sujet semblait faire peur aux producteurs. Ils ne trouvaient pas correct de parler de ça. Le succès du livre (plus de 200 000 exemplaires vendus depuis cinq ans aux éditions Fayard) m'a rassurée sur l'intérêt de l'histoire. J'ai ensuite rencontré de jeunes producteurs plus ouverts (à financer le film).»

Cliente
s'intéresse au parcours de Judith (Baye), quinquagénaire divorcée, à l'aise financièrement, qui comble son manque de tendresse et sa solitude en faisant appel aux services réguliers d'une escorte masculine, Patrick (Caravaca). L'ennui, c'est que le jeune homme est marié et que son épouse (Isabelle Carré) n'est pas au courant de ce «travail» lucratif qui lui permet de payer l'hypothèque de son salon de coiffure.

Pour le rôle de l'escorte masculine, Balasko ne voulait pas d'un «minet musclé» ou d'un «Apollon du Net». Elle désirait un personnage à l'allure et aux traits plus classiques. Elle l'a trouvé en Éric Caravaca (vu dans La chambre des officiers et La raison du plus faible).

«Lui-même n'imaginait pas du tout le personnage comme ça, précise-t-elle. Je ne voulais pas de quelqu'un de trop beau, qu'on peut voir sur les couvertures de magazines, sur lequel les gens se retournent sur son passage. Il faut comprendre que la consommation du sexe est différente chez les femmes. Elles ne fantasment pas nécessairement sur la beauté. Elles sont davantage séduites par la tendresse et la gentillesse. Elles ont besoin d'un cérémonial, de galanterie.»

L'amour qui fait mal

La réalisatrice ne saurait dire si le phénomène décrit dans Cliente est monnaie courante chez les femmes d'aujourd'hui. «Ces sites existent, c'est certain. S'il y a une offre, je suppose qu'il y a une demande. Il est maintenant plus facile de trouver quelqu'un sur le Net que dans la vraie vie.»

Cliente parle aussi et surtout de la solitude chez les femmes vieillissantes, désabusées par l'amour. C'est le cas du personnage incarné par Nathalie Baye. «Je ne crois pas qu'elle ne veuille plus de l'amour. Elle cherche surtout à s'en protéger, après avoir beaucoup souffert. Elle veut se protéger des sentiments et elle le fait en payant un homme. Elle s'est fabriqué une armure. Elle ne veut plus aimer. On s'en rend compte dans la scène où elle croise son ex-mari.»

Balasko s'est aussi offert un petit rôle devant sa caméra, celui d'Irène, la soeur aventureuse de Judith, qui découvrira l'amour dans les bras d'un... Indien de l'Ouest américain. «Elle est totalement l'opposé de sa soeur, même si elles sont très proches et forment presque un couple. C'est une midinette dans la cinquantaine qui cherche l'amour absolu et qui le trouve.»

Cliente prend l'affiche la semaine prochaine.