Dans le nouveau film de Robert Redford, Robin Wright incarne un personnage pratiquement ignoré des livres d'histoire. Mary Surratt fut pourtant la première femme exécutée sous l'ordre du gouvernement américain.

La toute première fois où Robert Redford lui a parlé de The Conspirator, Robin Wright n'a pratiquement pas su que l'histoire du film était liée à l'assassinat du président Abraham Lincoln.

«En fait, si, d'expliquer l'actrice au cours d'un entretien téléphonique avec La Presse un peu plus tôt cette semaine. Robert l'a mentionné. Mais il insistait beaucoup pour dire que son film ne serait pas une leçon d'histoire. Il se concentrait plutôt à me décrire la relation entre cette mère, accusée de complicité par les autorités, et le jeune avocat qui la défend. Qui devient un peu son fils adoptif en quelque sorte. Je n'avais jamais entendu parler de cette Mary Surratt auparavant. Les livres d'histoire ne font pratiquement jamais mention de son nom.»

Mary Surratt fut un personnage secondaire dans un événement dont l'histoire n'a retenu que les deux protagonistes: Abraham Lincoln, et son assassin John Wilkes Booth. Âgée de 41 ans au moment de sa mort, cette femme était propriétaire d'une pension de famille qu'ont fréquentée l'assassin de Lincoln et ses complices. Son propre fils, John, était du nombre.

Au lendemain de l'assassinat, alors que le traumatisme de la guerre de Sécession est encore très douloureux, Mary Surratt fut accusée de complot devant un tribunal militaire plutôt que civil, raison d'État oblige. Elle fut condamnée à la pendaison. Et exécutée en compagnie de trois autres conspirateurs.

Des liens évidents

Le scénario, sur lequel James Solomon a travaillé pendant plus de 15 ans, évoque la notion de suppression des droits civils d'un individu au nom de la sécurité nationale. Forcément, des liens peuvent être établis entre le climat régnant au lendemain du meurtre du président Lincoln en 1865, et celui qui a marqué la dernière décennie aux États-Unis.

«Robert nous disait toujours que son film n'avait pas à insister sur cet aspect-là, fait remarquer Robin Wright. Les parallèles qu'on peut tracer entre les deux époques relèvent de l'évidence. Il n'y a rien à ajouter. Il préférait de loin s'attarder au côté humain de cette histoire. Avec cette mère qui plaide l'ignorance, et que défend un jeune avocat qui, même s'il croit qu'elle ment pour protéger son fils, estime indigne le traitement qu'on lui inflige.»

Il y a dix ans, Robin Wright avait croisé brièvement Robert Redford dans The Last Castle, un film de Rod Lurie dans lequel elle incarnait sa fille. Cette fois, elle a eu l'occasion de travailler de façon plus étroite avec lui, sous la houlette d'un cinéaste accompli.

«Il est certain qu'être dirigée par quelqu'un comme Robert Redford rend les choses beaucoup plus faciles, fait-elle remarquer. Dans la mesure où un cinéaste aussi acteur est mieux en mesure de comprendre les mécanismes du jeu. Aussi, j'ai bien aimé le fait d'être très présente à l'écran, mais de ne pas avoir beaucoup de répliques à livrer. Le personnage se vit de l'intérieur, de manière plus subtile.»

Robin Wright s'est documentée le plus possible, mais elle estime qu'un personnage historique n'amène pas de responsabilité particulière sur le plan du jeu. D'autant plus que Mary Surratt est un personnage méconnu de l'histoire.

«Dès qu'on enfile le corset, le personnage s'incruste en nous, qu'on le veuille ou non! , dit-elle. Cette horrible coiffure m'a beaucoup aidée aussi!»

Une année faste

L'année cinématographique 2011 s'annonce en tout cas fructueuse pour l'actrice, divorcée de Sean Penn depuis l'an dernier. Outre The Conspirator, Robin Wright tient un rôle important dans Moneyball, un film de Bennett Miller dans lequel elle donne la réplique à Brad Pitt (sortie en septembre); sans oublier The Girl With The Dragon Tattoo, l'adaptation américaine de Millénium qu'a réalisée David Fincher. Dans cette superproduction, dont la sortie est prévue en décembre, l'actrice se glisse dans la peau d'Erika Berger, cofondatrice et directrice du magazine Millénium.

Robin Wright vient par ailleurs de terminer le tournage de The Congress, un film mêlant la réalité à l'animation, réalisé par Ari Folman, un cinéaste reconnu grâce à son précédent film Valse avec Bachir.

«La maturité aidant, j'ai encore plus de plaisir à jouer qu'auparavant, fait-elle remarquer. Le propos d'une histoire guide mes choix avant tout. Il faut que j'aie envie de le partager. Si, en plus, un excellent scénariste, un excellent cinéaste, et d'excellents acteurs sont de la partie, là c'est la fête. J'avoue être gâtée ces temps-ci.»

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The Conspirator prend l'affiche le 6 mai en version originale anglaise seulement.