Trou Story, le nouveau film du tandem de réalisateurs engagés composé de Richard Desjardins et Robert Monderie, s’emploie à dynamiter l’industrie minière, s’attaquant aux traitements des travailleurs, aux retombées pour les communautés ainsi qu’aux impacts environnementaux.


Douze ans après le choc causé par la sortie du film L’Erreur boréale, qui s’attaquait à l’industrie forestière, et quatre ans après Le Peuple invisible, qui faisait découvrir les conditions de vie moyenâgeuses des peuples des Premières Nations, le duo rouynorandien reprend du service, abordant cette fois les travers de l’industrie minière par le prisme historique. Il souhaite ainsi faire comprendre l’importance qu’occupent encore aujourd’hui les compagnies dans le quotidien de régions entières.


«Leur influence, leur pouvoir est exorbitant», explique Richard Desjardins.


«Ça a toujours été comme ça, les lois ont toujours été écrites - en tout cas jusqu’à maintenant - par les mines elles-mêmes. C’est pas compliqué: tout est sur leur bord», résume le chanteur de 63 ans.


Le film retrace l’histoire de l’exploration et de l’exploitation minière depuis la fin du 19e siècle, alors que le nord de l’Ontario devenait le nouveau Klondike, attirant investisseurs et travailleurs, tous venus pour le même but - mais avec des résultats inégaux: s’enrichir.


Le spectateur assiste ensuite aux débuts chancelants de la syndicalisation des travailleurs, qui travaillaient alors jusqu’à six jours et demi par semaine et mouraient en moyenne avant 50 ans, au cours de la première moitié du siècle dernier.


Desjardins et Monderie s’attardent aussi à la situation actuelle, où les droits miniers ont encore préséance, en présentant notamment le cas d’une mine à ciel ouvert qui a nécessité, au cours des dernières années, le déplacement d’un quartier complet de la petite municipalité de Malartic, en Abitibi-Témiscamingue.


«Il y a une société maintenant qui s’est établie là, qui n’est pas nécessairement dans l’industrie minière, les gens ont une vie à vivre aussi et ils n’ont pas d’affaire à se faire tasser, comme à Malartic», estime M. Desjardins.


De plus, les deux hommes affirment que les communautés touchent rarement la part qui leur revient. «On n’a toujours pas de rentes publiques intéressantes dans toute cette histoire-là. Cette année, pour le projet Raglan, dans le Nord chez les Inuits, ils vont recevoir 80 millions $, tandis qu’à Malartic, ils vont recevoir 150 000 $», avance Richard Desjardins.
«C’est la démesure de ce monde-là qui est a dénoncer. En connais-tu, toi, des «business» où ça coûte, disons 400 $ pour produire un once, pis sur le marché, c’est pas loin de 1600 $ (...) C’est 400 pour cent! Faut que ça soit calculé comme un revenu: plus tu fais de l’argent, plus t’es imposé. Pourquoi c’est pas comme ça avec eux-autres?», s’indigne le chanteur.


Le film aborde également la situation des bassins de résidus miniers, véritables poubelles chimiques à ciel ouvert, dont les minières semblent se désintéresser aussitôt le minerai extrait, et dont la responsabilité retombe souvent dans la cour du gouvernement.


«On se demande pourquoi l’industrie minière n’est pas tenue responsable de ces dommages-là. Pourquoi il n’y a pas un fonds substantiel pour aborder ses problèmes-là.»
Avec Trou Story, l’auteur-compositeur-interprète et le photographe dressent le portrait d’une industrie gourmande et égoïste, à l’affût des occasions d’affaires mais sans considérations pour la communauté, les impacts environnementaux et les travailleurs.


Trou Story sera présenté en première mondiale dans le cadre du Festival du cinéma en Abitibi-Témiscamingue, le 30 octobre à Rouyn-Noranda. Le film sortira ensuite en salles le 4 novembre.