Après avoir remporté deux prix à la Mostra de Venise (meilleure réalisation et meilleur espoir masculin à Seydou Sarr), Moi capitaine prend l’affiche au Québec. Le nouveau film de Matteo Garrone raconte l’atroce réalité des migrants clandestins traversant la Méditerranée pour se rendre en Europe. La Presse a joint Seydou Sarr aux États-Unis, au milieu d’une tournée de promotion du film.

Il y a deux ans, Seydou Sarr avait une vie normale d’adolescent sénégalais, entre l’école et le football à Thiès, à 70 km de Dakar. Aujourd’hui, il vit en Italie et se prépare à assister à la cérémonie des Oscars, le 10 mars prochain. Car Moi capitaine, son tout premier film, est en compétition dans la catégorie du Meilleur film international.

« Tout ça, c’est grâce à ma mère, nous confie le jeune homme de 19 ans, en entrevue par Zoom, en transit à l’aéroport de San Francisco. Ma mère faisait du théâtre plus jeune et elle rêvait d’être une actrice connue. Lorsque ma sœur lui a dit qu’il y avait des auditions dans notre ville pour trouver des jeunes de moins de 18 ans pour jouer dans le film, ma mère m’a supplié d’y aller. »

PHOTO GRETA DE LAZZARIS, FOURNIE PAR IMMINA FILMS

Moi capitaine, avec Seydou Sarr, est inspiré de l’histoire d’un Guinéen de 15 ans emprisonné en Sicile après avoir été forcé à conduire un bateau avec des centaines de migrants à partir de Tripoli.

Mais le matin du jour J, Seydou préfère se rendre au terrain de football rejoindre son équipe. Sa sœur viendra le chercher en taxi pour l’emmener auditionner après son match… avec plus de 200 adolescents sénégalais. Deux semaines plus tard, la production téléphone pour lui demander de venir à Dakar passer des auditions finales.

Cap vers l’espoir

Moi capitaine est inspiré de l’histoire d’un Guinéen de 15 ans emprisonné en Sicile après avoir été forcé à conduire un bateau avec des centaines de migrants à partir de Tripoli. Le réalisateur Matteo Garrone (Dogman, Gomorra) a choisi de jeunes protagonistes sénégalais qui rêvent d’améliorer leur vie en Europe, de travailler et de faire carrière en musique, en croyant que la réalité sur le Vieux Continent correspond aux images sur Instagram et TikTok.

Sarr joue l’un des deux cousins de 16 ans qui, sans prévenir sa famille, décide d’aller en Europe. Il vivra un long et terrible périple qui lui fera entre autres traverser le Sahara et perdre de vue son cousin, avant de le retrouver blessé et de conduire une vieille embarcation pour traverser la mer. Dans sa quête de liberté et de bonheur, Seydoux verra plutôt l’horreur, la corruption, la torture. Mais gardera espoir en l’humanité.

PHOTO GRETA DE LAZZARIS, FOURNIE PAR IMMINA FILMS

Moi capitaine, du réalisateur Matteo Garrone, est finaliste aux Oscars dans la catégorie du Meilleur film international.

Le cinéaste italien met donc en perspective ce drame humanitaire qu’on aperçoit aux bulletins de nouvelles. En général, les Occidentaux ne voient que ces images de bateaux en Méditerranée, ou de cadavres flottants en mer, avec le décompte de chiffres. « On oublie les êtres humains. C’est d’une grande injustice », dit l’acteur qui ne connaissait personne ayant migré vers l’Europe de son pays natal avant de faire ce long métrage.

« Le film m’a appris beaucoup de choses et m’a fait grandir, dit-il. Je veux remercier Matteo [Garrone] de m’avoir choisi, même si je n’avais aucune expérience de jeu. Il nous montre la réalité de la migration clandestine du point de vue des migrants africains. Du début à la fin de leur périple. Et surtout, la grande injustice qu’ils subissent. Pourquoi les jeunes Européens peuvent partir en vacances au Sénégal en avion, alors que les Africains doivent entreprendre un voyage inhumain sans savoir s’ils arriveront vivants ? »

Le tournage a été très dur, parce que je n’avais pas d’expérience et je ne pensais pas y arriver. Mais ma mère m’a accompagné et conseillé pour bien jouer le personnage tout le long du tournage. Je lui ai d’ailleurs dédié mon prix remporté à Venise.

Seydou Sarr

Est-ce qu’il a d’autres projets au cinéma ? « Mon agent m’a appelé pour m’en proposer, mais en ce moment, je me concentre sur la promotion du film et les Oscars. Et je rêve encore à une carrière au football. Je peux faire les deux en parallèle. » Comme Éric Cantona !

Moi capitaine (Io Capitano) prend l’affiche au Québec ce vendredi, en version originale et en version sous-titrée anglaise.

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