Dans Niagara, trois frères se réunissent après la mort absurde de leur père. Pour son deuxième film, Guillaume Lambert a confié des premiers rôles au cinéma à François Pérusse et à Véronic DiCaire, et il les a entourés des acteurs d’expérience Éric Bernier et Guy Jodoin. Entrevues en vue de la sortie de ce drame comique au cinéma ce vendredi.

« François est un acteur magnifique qui s’ignorait », lance Guillaume Lambert.

Si le réalisateur n’a pas eu de mal à convaincre le célèbre créateur des Albums du peuple d’assurer le rôle de narrateur dans son premier film Les scènes fortuites, il en fut autrement pour Niagara.

« Guillaume m’a contacté pour me dire : “Je suis en train d’écrire un deuxième film et le personnage principal me fait penser à toi. Pas l’humoriste, mais le gars. Mais ne prends pas ça mal, c’est un gars pour qui tout va vraiment mal”, raconte François Pérusse. Je lui ai répondu que j’étais très flatté, mais que je n’étais pas un acteur. »

Celui qui a un tempérament casanier en proie à de l’insécurité a néanmoins accepté de prendre part à une lecture du scénario dans son studio avec Éric Bernier.

L’expérience fut concluante, si bien que François Pérusse a accepté – malgré ses craintes « de ne pas être bon » – de jouer le personnage d’Alain, un professeur de taekwondo faussement accusé d’inconduite.

Au début du film, ce dernier est au beau milieu du pont qui surplombe la chute Montmorency. Il contemple le vide, mais un incident cocasse l’empêchera de commettre l’irréparable. Dès lors, on comprend le registre de Niagara : un drame comique et même parfois absurde.

« Je voyais ce personnage-là à la mi-temps de sa vie au-dessus d’un pont. Il chute dans sa propre vie », expose Guillaume Lambert.

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Éric Bernier, François Pérusse et Guy Jodoin

Alain va recevoir l’appel de son frère vigneron (Guy Jodoin) lui annonçant que leur père (Marcel Sabourin) est mort sur sa terre de la péninsule de Niagara. Alain va donc s’y rendre en passant prendre son frère Léo-Louis (Éric Bernier) à Montréal.

Comment est mort le paternel ? En faisant l’Ice Bucket Challenge, ce défi qui consiste à recevoir une chaudière d’eau glacée sur la tête pour sensibiliser les gens à la sclérose latérale amyotrophique (SLA).

C’est arrivé dans la réalité, souligne Guillaume Lambert, qui précise être fasciné par les faits divers et les « morts niaiseuses ».

Niagara veut dire « le tonnerre des eaux », signale-t-il, ce qui a beaucoup inspiré l’idée de faire un film « d’une chute à une autre » avec des protagonistes dans lesquels gronde une « colère intérieure ».

Éric Bernier se réjouit de jouer – comme lui – un homme gai dans la cinquantaine qui se rapproche de son frère et qui vit le deuil d’un parent. « Je n’aurais pas pu jouer ce rôle à 40 ans. »

Pour devenir Léo-Louis, un « risk manager » urbain qui « fesse dans tout », Éric Bernier s’est taillé une moustache à la Jean-Pierre Bacri pour se donner un air à la fois bougon et tendre. « Je suis souvent choisi pour des rôles de bons gars gentils. Là, j’incarne quelqu’un qui n’est pas bien, qui est troublé. »

Véronic Dicaire au cinéma

Une bonne partie du film – divisé en chapitres – est le road trip des frères Alain et Léo-Louis. L’esthétique kitsch de Guillaume Lambert rappelle celle d’une « carte postale jaunie », dit-il, avec justesse.

À Oshawa, ils vont croiser une serveuse et sa fille enceinte, incarnées par Véronic DiCaire et Katherine Levac. Pendant notre entretien avec Éric Bernier, sa partenaire de jeu dans Drôles de Véronic lui saute dans les bras. « C’est Éric qui a parlé de moi à Guillaume, précise l’imitatrice. Je n’avais jamais joué au cinéma. »

Séduite par l’univers à la fois « disjoncté » et « connecté » de Guillaume Lambert, Véronic DiCaire a teint ses cheveux en roux et elle a fignolé le bon accent anglophone francophile de son personnage. Elle a pu accepter de jouer le rôle de Stacy car Niagara a été tourné à l’été 2021, soit pendant que sa tournée était en suspens.

Quant à Guy Jodoin, il a tenu à faire partie de la distribution de Niagara malgré ses multiples engagements professionnels.

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Guy Jodoin

C’était impossible dans mon horaire selon mes agentes, mais des rôles dans des films québécois, il n’y en a pas une pelletée.

Guy Jodoin

L’animateur et comédien a pris le soin d’aller voir travailler un vigneron pour la crédibilité de son jeu. Il a aussi visité une école de coiffure. « Il y a une belle scène où je coupe les cheveux de mon père et je ne voulais pas faire ça tout croche. »

« J’incarne le grand frère. Il est plus déposé, terrien, et il en laisse peu paraître […] Il fallait que je sois groundé et que j’y croie », ajoute-t-il.

Avec le recul, François Pérusse se réjouit d’avoir accepté l’offre audacieuse du réalisateur révélé comme acteur dans Like-moi !. « Dès le premier jour du tournage, la glace s’est brisée et j’ai trouvé mon confort. Et quand j’ai vu le film, j’ai oublié que j’étais dedans… J’étais un spectateur. »

Niagara prend l’affiche vendredi