Encore tout récemment, la réalisatrice américaine Sara Dosa ne savait rien du couple de volcanologues français Katia et Maurice Krafft. C’est en cherchant des images de volcans islandais en éruption pour un autre film qu’elle est tombée sur les travaux du couple.

« Leurs images étaient absolument spectaculaires et fascinantes », raconte-t-elle en entrevue téléphonique de Paris, à quelques heures de la première européenne de Fire of Love. « Mais c’est quand nous en avons appris davantage à leur sujet en tant que personnes – un couple marié, amoureux l’un de l’autre et amoureux des volcans, des gens philosophes, espiègles et charmants – que nous avons désiré faire un film à leur sujet. Un film qui permettrait d’entrer dans leur univers, de voir le monde à travers leurs yeux et la lentille de leurs caméras. »

Katia et Maurice Krafft sont disparus dans une nuée incandescente au mont Unzen, au Japon, en juin 1991. C’est donc dans les livres et les archives du couple que l’équipe de Fire of Love a dû plonger pour apprendre à le connaître.

PHOTO ERIK TANNER, GETTY IMAGES

Sara Dosa, réalisatrice de Fire of Love

« C’était dans les premiers mois de la pandémie, se rappelle Sara Dosa. Notre productrice, Ina Fichman, qui est établie à Montréal, a pu entrer en contact avec les archives Images’Est, à Nancy [en France], qui a superbement bien numérisé les images pour nous les envoyer par internet. »

L’équipe a ainsi obtenu de 180 à 200 heures d’images en format 16 mm prises par le couple. En outre, grâce au travail d’une recherchiste québécoise de contenu et d’archives, Nancy Marcotte, l’équipe a pu mettre la main sur 45 à 50 heures d’entrevues accordées par Katia et Maurice Krafft à la télévision.

« C’étaient des célébrités, commente Sara Dosa. On les voyait dans des bulletins de nouvelles, des émissions de variétés, des magazines télévisés de voyages et d’aventures. »

L’équipe a également consulté près d’une vingtaine de livres publiés par le couple. « Ça nous a donné une meilleure idée, non seulement de leurs aventures, mais de leur philosophie, de leur style de vie. »

La force du visuel

La réalisatrice a interviewé plusieurs proches, mais a choisi de ne pas inclure ces entrevues dans le documentaire. Elle a préféré mettre l’accent sur le matériel laissé par le couple.

Nous voulions que le film soit guidé par les images de Katia et Maurice, par leurs mots.

Sara Dosa, réalisatrice

En outre, inclure ces entrevues dans le documentaire aurait introduit une rupture dans sa temporalité. « C’était important pour nous de mettre l’intrigue au temps présent afin d’avoir l’impression d’être avec Katia et Maurice tout au long de leur parcours. »

Même si les images captées par le couple remontent à 30 ou 40 ans, elles demeurent impressionnantes. « Ils étaient très talentueux, explique Sara Dosa. Ainsi, lorsque Katia était petite, elle était fascinée par la peinture, par les arts. Elle a gardé un regard très artistique dans ses images. »

La réalisatrice salue le travail de la postproduction, « qui a su faire ressortir les couleurs et la texture des images de Katia et Maurice ». C’est l’entreprise montréalaise Post-Moderne qui a signé ce travail. D’autres Québécois ont participé à l’aventure, comme Gavin Fernandes et Patrice LeBlanc au son.

Cette présence québécoise était voulue.

Nous voulions une composante francophone significative. Je comprends le français, mais je ne le parle pas très bien. Nous voulions que l’équipe de postproduction ait le français comme langue première. Nous avons pu ainsi faire monter à bord des artisans remarquables.

Sara Dosa, réalisatrice

Dans la version originale anglaise, la réalisatrice a choisi de ne pas doubler Katia et Maurice Krafft, qui s’expriment essentiellement en français, et a opté pour des sous-titres.

La version française fait également appel aux sous-titres plutôt qu’au doublage pour la narration, effectuée par la cinéaste Miranda July.

Sara Dosa a également choisi de ne pas s’appesantir sur la mort du couple de volcanologues.

« À travers nos recherches et nos conversations, nous avons compris qu’ils vivaient la vie qu’ils rêvaient de vivre, une vie pleine de signification et d’amour. Ils savaient qu’ils pouvaient mourir à tout moment en faisant ce type de travail. Ce n’est pas qu’ils voulaient mourir, mais ils avaient fait la paix avec cette idée. Il ne s’agit pas de célébrer leur mort, mais de célébrer leur vie. »

En salle le 22 juillet