L’an dernier, Nisha Ganatra s’est immiscée dans le monde des talk-shows de fin de soirée grâce à son film Late Night. Dans The High Note, elle explore cette fois le milieu de la musique populaire. Les deux films liés au showbiz donnent l’occasion à la réalisatrice d’explorer cet univers d’un point de vue féminin. Entretien.

La Presse : The High Note relate l’histoire d’une jeune femme, interprétée par Dakota Johnson, qui rêve de gravir les échelons dans le monde de la musique populaire et de devenir un jour productrice. En attendant, elle fait ses classes à titre d’assistante personnelle de l’une des plus grandes vedettes de la chanson. Quel a été le point de départ de ce film ?

Nisha Ganatra : Quand j’ai eu connaissance de l’existence de ce scénario dont Working Title, une compagnie de production que j’apprécie beaucoup, possédait les droits, j’ai tout de suite demandé qu’on me l’envoie.

De là, tout s’est mis en place assez rapidement. À la lecture, j’ai beaucoup aimé le ton, l’humour, mais aussi, surtout, le fait que l’histoire qu’a imaginée Flora Greeson est construite autour de deux personnages féminins forts. J’ai toujours adoré les films campés dans le monde du showbiz et je suis particulièrement attirée par le milieu de la musique. Vraiment, là, tout était réuni.

Est-ce qu’au moment de votre arrivée dans ce projet, la distribution était déjà établie ?

Dakota Johnson était déjà liée au projet, mais sinon, la distribution entière restait à établir.

Comment en êtes-vous arrivée à fixer votre choix sur Tracee Ellis Ross pour incarner la grande vedette ? Cette dernière, connue surtout grâce à la comédie Black-ish, est reconnue à titre de comédienne, mais elle n’avait jamais chanté la moindre chanson publiquement auparavant. Dans la peau de Grace Davis, non seulement on découvre une vraie chanteuse, mais Tracee Ellis Ross dégage aussi un charisme assez fort pour séduire de grandes foules en concert.

J’ai tout de suite pensé à elle pour ce rôle. Je connaissais Tracee depuis un moment déjà et j’ai toujours vu en elle une actrice de talent, qui possède un vrai sens de la comédie. Le personnage de Grace étant une immense vedette, une icône, en fait, j’avais besoin d’une interprète qui pouvait à la fois faire rire, être attachante malgré ses défauts, et aussi avoir une grande connaissance du show-business afin de pouvoir traduire ce monde de la façon la plus juste. Qui d’autre que Tracee pouvait faire ça ? Elle a grandi dans un milieu où sa mère est l’une des plus grandes stars du monde et son père, un manager. Elle pouvait mettre dans son jeu toutes les nuances nécessaires.

Justement, Tracee Ellis Ross étant la fille de Diana Ross, n’y avait-il pas danger d’émulation ? Dans la mesure où, en regardant le film, le spectateur peut difficilement oublier la filiation, tellement la ressemblance est parfois frappante ?

Tracee n’a pas hésité une seule seconde. La première fois où nous nous sommes rencontrées pour discuter du scénario, elle était partante. Pour tout. La seule chose un peu plus délicate, à mes yeux, était le fait qu’elle n’avait jamais joué dans un film auparavant. Je savais qu’elle a tous les atouts d’une vedette de cinéma, mais le rôle exige aussi qu’elle chante. C’était la chose la plus inquiétante pour moi, car Tracee a caché sa voix au monde entier pendant toutes ces années. Ni moi ni personne ne l’avait jamais entendue chanter. Mais elle était à l’aise et confiante. Elle se sentait prête à le faire, et nous avons été subjugués — et soulagés — par la qualité de sa voix et de ses interprétations.

Elle devait être crédible non seulement à titre de chanteuse, mais aussi à titre de « diva », ce qui n’est pas donné à tout le monde.

Ce n’était vraiment pas simple pour Tracee, car elle était bien consciente que les comparaisons avec sa mère seraient inévitables. Même si l’histoire du film n’est en rien inspirée par celle de Diana Ross, il reste qu’ayant côtoyé une icône toute sa vie, Tracee pouvait mieux que personne comprendre le personnage qu’elle avait à jouer, qui est aussi de la trempe de femmes influentes comme Tina Turner, Madonna, Janet Jackson, Alicia Keys ou Beyoncé. Nous avons vraiment construit le personnage de Grace Davis en nous inspirant de toutes ces femmes, afin d’arriver avec une espèce de personnage somme, unique en son genre.

Quel était le plus grand défi à relever pour vous dans ce projet en tant que cinéaste ?

La musique, sans aucun doute. Il fallait trouver des chansons originales pouvant susciter l’adhésion des foules, qu’on souhaiterait entendre à la radio aujourd’hui, mais qui évoquent aussi la gloire d’une autre époque, dans la mesure où Grace s’appuie sur un répertoire riche des succès qu’elle a eus dans le passé. En même temps, elle veut se renouveler avec un nouvel enregistrement. Et puis, ces chansons originales devaient aussi se mesurer aux quelques classiques qu’on fait entendre dans le film. Fort heureusement, nous avons pu faire appel au grand producteur Rodney Jerkins pour superviser la trame musicale. On ne compte plus les artistes avec lesquels il a collaboré : Beyoncé, Lady Gaga, Mary J. Blige et bien d’autres.

PHOTO FOURNIE PAR UNIVERSAL PICTURES CANADA

Nisha Ganatra sur le plateau de The High Note

Votre film arrive à un moment où l’industrie du divertissement est à l’arrêt et où l’on s’interroge sur la suite des choses, notamment à propos de tout le glamour qui entoure le monde du spectacle et du cinéma.

J’ai bon espoir qu’un jour, nous pourrons retrouver le plaisir d’aller voir un film dans une salle de cinéma ou d’aller voir un spectacle que donnera un artiste sur scène, mais nous n’avons encore aucune idée si nous pourrons le faire dans un avenir proche ou plus lointain. Si ce film peut divertir les gens et leur faire oublier pendant un moment la crise que nous traversons, j’en serai ravie.

The High Note est offert en vidéo sur demande dès aujourd’hui, en version originale seulement.