Zahia a 17 ans. Elle est d’origine algérienne, vit en banlieue parisienne et rêve de fonder un orchestre symphonique. Mieux : d’en être carrément la cheffe. Oui : elle. Une femme.

Le scénario peut sembler farfelu à première vue. Quoi ? Une jeune fille pauvre, folle de musique classique, au point d’en manger la nuit et de rêver d’en faire sa vie ? Non pas pour être musicienne, mais cheffe d’orchestre, un bastion, on le sait, archimasculin ? Est-ce seulement crédible ?

Non seulement ça l’est, mais cette histoire aux délicieux accents woke, osons le dire, est surtout vraie, ce qui la rend d’autant plus intéressante. La réalisatrice française Marie-Castille Mention-Schaar propose en effet ici un drame biographique qui raconte le parcours aussi véridique qu’improbable de Zahia Ziouani, une jeune fille douée et passionnée qui a fondé à Stains, en banlieue de Paris, l’orchestre symphonique Divertimento, en 1998.

Un parcours non sans embûches, bien évidemment. On s’acharne d’ailleurs un peu beaucoup sur cette jeune fille, brillamment interprétée par Oulaya Amamra (révélée dans Divines, en 2017, qui lui a valu le César du meilleur espoir féminin, dont la passion viscérale pour la musique transparaît à l’écran), venue de nulle part, qui a tous les défauts qui soient : c’est une fille, on l’a dit, elle est d’origine algérienne, et pas exactement fortunée. La dualité (homme-femme, ville-banlieue, riche-pauvre) est aussi soulignée à gros traits, frôlant la caricature par moments, sans non plus y plonger franchement, Dieu merci.

PHOTO FOURNIE PAR AXIA FILMS

Divertimento, drame biographique signé Marie-Castille Mention-Schaar, prend l’affiche le 21 juillet au Québec.

« Pas un métier de femme »

« Être chef, ce n’est pas un métier de femme », se fait-elle répéter. Sans parler des insultes que lui balancent d’entrée de jeu ses collègues parisiens, plutôt vaches, quoiqu’un brin forcées, et pas toujours claires pour les spectateurs outre-Hexagone que nous sommes, faut-il signaler (notamment l’allusion au 93, le code postal du département de Seine-Saint-Denis).

Mais voilà que ses efforts vont porter leurs fruits, et pas qu’un peu. Car surprise : tous finissent (un peu vite, sans doute aurait-on aimé mieux saisir comment le charme opère) par se rallier à elle, à commencer par le grand maestro qui la prend sous son aile (interprété ici par Niels Arestrup, aussi juste qu’impitoyable).

Un mot sur son père, mélomane, à qui Zahia doit tant, joué avec grande tendresse par Zinedine Soualem, et surtout sa sœur, interprétée par Lina El Arabi, une comédienne qui joue du violon dans la vie et qui porte brillamment l’archet du violoncelle ici.

Il n’est pas nécessaire d’être mordu de musique classique pour apprécier ce récit inédit, aux airs de fable allégorique. Car même si bon nombre de refrains bercent effectivement le spectateur tout le long (Ravel, Saint-Saëns, Schubert, et on vous met au défi de ne pas battre du pied par moments), l’histoire nous amène au-delà de la scène musicale, pour aborder de grands thèmes universels : les rêves, la solidarité, la sororité. Et par-dessus tout : la persévérance.

Non, la musique ne peut pas changer le monde, mais sa pratique peut assurément changer des gens, croit dur comme fer cette étonnante Zahia. Et un récit inspirant comme celui-ci aussi.

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Divertimento

Drame biographique

Divertimento

Marie-Castille Mention-Schaar

Avec Oulaya Amamra, Lina El Arabi, Niels Arestrup

1 h 55

7/10