Afin d’attirer plus de clients au café de son mari, une jeune mariée atteinte d’hirsutisme se fait pousser la barbe.

Après avoir consacré un drame biographique à Loïe Fuller, muse des frères Lumière et rivale d’Isadora Duncan, Stéphanie Di Giusto (La danseuse, 2016) s’est librement inspirée du destin de Clémentine Delait (1865-1939), tenancière de bar, femme à barbe et mascotte des Poilus durant la Première Guerre mondiale, afin de créer un personnage féminin assoiffé d’amour et animé d’une foi inébranlable.

Écrit avec Sandrine Le Coustumer, d’après un traitement que cette dernière a signé avec Alexandra Echkenazi, Rosalie nous transporte dans la France humiliée par la guerre franco-prussienne, dans une petite bourgade bretonne, où Barcelin (Benjamin Biolay), directeur de l’usine textile, règne en despote. Blessé de guerre, Abel (Benoît Magimel) y tient à bout de bras un café où les clients se font trop rares. Dans l’espoir de rembourser une lourde somme à Barcelin, Abel épouse Rosalie (Nadia Tereszkiewicz) avec la complicité du père de cette dernière (Gustave Kevern).

Ravissante, instruite, douée pour la couture et autres arts ménagers, Rosalie cache à son mari un lourd secret : depuis la naissance, elle est atteinte d’hirsutisme. Abel s’emporte en découvrant les poils couvrant le corps de la jeune mariée, qui rêve d’élever une famille. Refusant de se laisser abattre, Rosalie s’emploiera à faire revenir les clients au café. Pour cela, elle se fera pousser la barbe.

À travers ce lumineux portrait de femme nageant à contre-courant de la société, Stéphanie Di Giusto livre une ode émouvante à la différence et à la liberté, néanmoins teintée d’un romantisme quelque peu suranné et mélodramatique. Ainsi, aux ouvriers, les uns hostiles, les autres sans volonté propre, qui semblent tout droit sortis d’un roman de Zola, la réalisatrice oppose une héroïne frisant par moments l’angélisme. De même, la reconstitution d’époque donne à voir un village presque trop propre et trop lisse, menaçant de transformer l’ensemble en une galerie d’images d’Épinal.

Porté par la grâce de Nadia Tereszkiewicz, savant mélange de naïveté, de sensualité et de témérité, Rosalie parvient toutefois à rendre captivante l’évolution du couple maudit que forment la jeune femme à la barbe et son mari rigide et froid, incarné avec sobriété par Benoît Magimel. À une époque où tant de jeunes personnes se soumettent aux diktats de la beauté jusqu’à devenir des clones de célébrités régnant sur les réseaux sociaux, Rosalie s’avère une irrésistible bouffée de fraîcheur.

En salle

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Rosalie

Drame

Rosalie

Stéphanie Di Giusto

Nadia Tereszkiewicz, Benoît Magimel, Benjamin Biolay

1 h 55

6,5/10