Marc est curé et s’occupe des pauvres et des sans-abri depuis 25 ans. L’homme est fatigué, usé, et surtout criblé de dettes. Son église menace de fermer, quand il hérite par un coup du destin d’un domaine sur le bord du fleuve. C’est décidé : il y part pour l’été, avec une bande de sans-abri avec lui.

Ce n’est pas une secte. Ni une commune. Mais une sorte de « camps de vacances » improbable, qui débarque un beau jour à Sainte-Blandine-sur-Mer, petit village bucolique aux airs de carte postale du Bas-Saint-Laurent.

Ils sont une douzaine, le curé Marc (noble et surprenant Patrice Robitaille) et sa complice, sœur Monique (sage et convaincante Élise Guilbault), avec leur joyeuse troupe hétéroclite de sans-abri, à quitter la ville et son béton pour passer ici l’été au grand air, et profiter au passage des vacances d’été.

Cette idée originale et ce scénario un peu inattendu, signés Marie Vien (La passion d’Augustine, 14 jours 12 nuits), dans une réalisation de Louise Archambault (Gabrielle, Il pleuvait des oiseaux), auraient pu tomber dans le piège de la légèreté. Ou pire, de la caricature. Mais c’est tout le contraire qui nous attend ici. Avec finesse, pudeur, et une infinie sensibilité (sans parler de la distribution béton, avec de grands noms incluant Guy Nadon, Gilbert Sicotte et Sébastien Ricard), on assiste plutôt à un récit plein d’humanité, leçons de vie, durs destins et bons sentiments inclus. Une sorte de voyage, ou plutôt un road trip, avec sa musique aussi présente qu’essentielle (Pierre Kwenders, Richard Desjardins, Leonard Cohen), pour doucement bercer le tout. Et ça fait un bien fou.

Oui, c’est un film lent. Contemplatif. Et c’est parfait ainsi. Le temps d’un été n’est pas non plus un film bavard. Les dialogues ne sont jamais gratuits. Et les silences en disent souvent long. Le film rappelle aussi par moments La grande séduction (Jean-François Pouliot), par son incursion en région, ainsi que Nomadland (Chloé Zhao), par son portrait intime de la vie des moins nantis. Une vie itinérante qui ne cesse par ailleurs de faire l’actualité, quoique moins poétiquement, faut-il le rappeler.

Bien sûr que non, tout ne se passera pas rondement. Il y aura des accrochages entre nos vacanciers en herbe, et les villageois ne les accueilleront pas exactement à bras ouverts.

N’empêche. Le récit demeure volontairement lumineux, quoiqu’on ait pris soin de ne pas non plus édulcorer les personnages : nos sans-abri sacrent, boivent et se disent leurs quatre vérités. Les villageois aussi. Et c’est d’ailleurs là qu’ils se révèlent. Ici, un avocat défroqué, là, un réfugié congolais. Mais aussi une femme trans suicidaire, un jeune de la DPJ, une jeune Inuite enceinte et un ex-militaire.

La scénariste a fait du bénévolat pendant des années à La Maison du Père et ça paraît. Ses personnages sont aussi diversifiés que vrais. Et si Guy Nadon, toujours grandiloquent, crève effectivement l’écran dans un rôle sur mesure, tous ses partenaires brillent aussi à leur tour. Même le peu accueillant et méchant de service (Sébastien Ricard) finit par être attachant (mais ça prendra du temps !).

Impossible de passer sous silence les prises de vue magnifiques sur le fleuve et l’esthétisme visuel, qui ajoutent une touche de beauté à ce récit qui n’en manque pas. Et même si la finale est aussi improbable que le préambule, on se laisse prendre à y croire. Et à y rêver... le temps d’un visionnement.

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Le temps d’un été

Comédie dramatique

Le temps d’un été

Louise Archambault

Avec Patrice Robitaille, Guy Nadon, Élise Guilbault, Martin Dubreuil et Sébastien Ricard

2 h 06

8/10