Inspiré d’un livre-enquête de la journaliste Caroline Michel-Aguirre à propos d’un scandale politico-industriel français survenu en 2012, La syndicaliste relate la lutte qu’a dû mener une lanceuse d’alerte pour non seulement dénoncer une situation condamnable, mais aussi pour retrouver son honneur sali.

Au-delà du rappel d’une affaire plutôt passée sous l’écran radar, Jean-Paul Salomé (Le caméléon, La daronne) dresse le portrait d’une femme dont le combat se déroule dans un contexte éminemment sexiste. Telle une émule d’Erin Brockovich, Maureen Kearney (Isabelle Huppert) s’est en effet obstinée jusqu’à ce que les autorités liguées contre elle reconnaissent enfin, six ans plus tard, son innocence.

Le récit commence par un évènement d’autant plus troublant qu’il est véridique. Déléguée syndicale chez Areva, ancienne société phare du programme nucléaire civil français (renommée Orano en 2018), Maureen Kearney est agressée chez elle par des inconnus encagoulés, ligotée à une chaise dans la cave de sa maison, la lettre A scarifiée sur l’abdomen, violée avec le manche d’un couteau.

Auparavant, elle avait su, grâce à un informateur anonyme, que l’État français, par l’entremise des sociétés Areva et Électricité de France (EDF), s’apprêtait à conclure une entente avec la Chine, auquel cas un transfert technologique très sensible aurait lieu vers l’empire du Milieu, provoquant à sa suite une immense vague de licenciements. Environ 50 000 personnes perdraient leur emploi.

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Isabelle Huppert et Yvan Attal dans La syndicaliste

Un récit authentique

Les politiciens font la sourde oreille, et Luc Oursel (Yvan Attal), le nouveau patron d’Areva, ne se gêne aucunement pour tenter d’intimider la syndicaliste avec force crises et autant de coups de gueule. Le fait que ce dernier, qu’on surnomme Kung Fu Panda, ait été mis en place par le gouvernement Sarkozy pour remplacer Anne Lauvergeon (Marina Foïs), la directrice précédente avec qui Maureen entretenait de très bonnes relations, n’apaise en rien les choses. Il est d’ailleurs à noter que les véritables noms des principaux intervenants de l’histoire sont ici utilisés.

Écrit par Fadette Drouard (Patients, La fine fleur) et le cinéaste Jean-Paul Salomé, le scénario emprunte ainsi la forme d’un thriller social et politique.

Au lendemain de l’agression, Maureen doit, en plus de soigner son traumatisme, faire face à une justice qui la prend pour une mythomane ayant tout inventé, car aucune trace des agresseurs n’est trouvée. Ce drame a bien entendu des répercussions dans sa vie professionnelle, mais également dans sa vie intime et personnelle.

Grégory Gadebois offre une belle performance dans le rôle du mari, et Marina Foïs, qui incarne à merveille la droiture d’un personnage qui comprend mieux que personne la situation, est remarquable dans le rôle de celle auprès de qui Maureen demande toujours conseil.

Orchestrant un thriller au climat tendu, Jean-Paul Salomé propose un film efficace, dont l’impact découle notamment du caractère authentique du récit. Poursuivant une association amorcée avec La daronne, dont la tonalité était beaucoup plus légère, Jean-Paul Salomé offre de nouveau à Isabelle Huppert – évidemment parfaite – l’occasion d’explorer une facette plus rare de sa personnalité d’actrice.

La syndicaliste a aussi le mérite de rappeler comment fonctionnent les rouages du pouvoir politico-industriel.

En salle

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La syndicaliste

Drame

La syndicaliste

Jean-Paul Salomé

Avec Isabelle Huppert, Grégory Gadebois, Yvan Attal

2 h 02

7/10