Incursions dans l’univers TikTok, Instagram et Periscope de trois groupes d’adolescentes

Ne vous laissez pas berner pas la légèreté du titre. Jouvencelles, aussi joli et vieillot soit le mot, n’a rien de rien de léger. Ni de dépassé, d’ailleurs. Tout le contraire.

Fanie Pelletier, qui a remporté le prix du meilleur premier long métrage pour son film au Festival international du film documentaire de Jihlava, en République tchèque, plonge pendant près d’une heure et demie le spectateur dans l’univers archiconnecté et très actuel des jeunes filles (et des jeunes filles seulement, les garçons étant ici totalement absents, du moins physiquement). Effets esthétiques, ralentis et autres gros plans inclus.

Pensez notifications, images TikTok et, surtout, vidéos en direct (lives). Le tout diffusé (martelé) à l’écran, et en alternance, avec en voix hors champ des réflexions de jeunes filles choisies, qu’on suit. Vous l’aurez compris : c’est étourdissant.

N’empêche qu’il ne se passe pas grand-chose dans Jouvencelles. Du moins, pas à vue de nez. À preuve : la caméra suit trois groupes d’amies tantôt marchant dans un parc. Tantôt cuisinant un gâteau. Ou encore se coupant les cheveux. On se demande où tout cela va nous mener. Et ça ne nous mène nulle part, quelque part.

Il ne se passe pas grand-chose, mais en fait, il se passe tout. Parce qu’en parallèle, ces jeunes filles dont les propos dangereusement lucides servent de seule et unique narration à ce film immersif qui n’en a pas ont une vie parallèle, justement. Elles chattent, publient, font des lives. Et échangent avec des milliers d’autres comme elles. Partout sur la planète. Oui, partout.

Si vous côtoyez des enfants de cet âge, leur langage ne vous surprendra pas. Des « parce que LOL » à toute vitesse, vous en avez entendu d’autres. Mais pour le public moins averti, disons, leur jargon sera sans doute moins évident. Plus déroutant, aussi, leur mode de vie. Une vie où l’estime de soi se mesure en likes, où le portrait se filtre et où la solitude transparaît, malgré les milliers d’échanges et autant d’interlocuteurs absents, concrètement, s’entend. Une vie, surtout, où l’image est omniprésente, avec tous les troubles (alimentaires) que cela implique. Et elles en sont très conscientes.

Jouvencelles est un film lent, (trop) long et par moments redondant, mais ô combien puissant. Personne ne traverse son adolescence en chantant. Mais à la suite de cette dérangeante immersion, on saisit à quel point les jeunes (filles) d’aujourd’hui ont une couche de complexité de plus à gérer. Et ça n’est pas exactement rassurant.

Jouvencelles est présenté en version originale française et en version originale avec sous-titres anglais.

En salle

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Jouvencelles

Documentaire

Jouvencelles

Fanie Pelletier

1 h 24

7/10